Evelyne Tan-Brouard est talent manager chez Albéa et coach professionnelle certifiée basée à Paris. Elle nous livre son regard sur l’impatriation.

(Complément du dossier « Le choc culturel inversé : le mal du pays d'adoption » paru dans Le 9 magazine, n°2)

Le 9 : Comment définissez-vous le « choc culturel inversé » ?

Evelyne Tan : Le « choc culturel inversé », c’est le fait de revenir dans son pays et ne plus s’y sentir chez soi ! Quand on vit à l’étranger pendant un moment, on s’adapte à un nouvel environnement. On peut vivre cette période à l’étranger comme grisante et excitante, mais lorsqu’on revient dans son pays, il peut aussi se produire un « choc » : on a l’impression de ne plus avoir de repères, de ne plus vraiment appartenir à cet environnement auparavant familier. Cela a un réel impact sur différents aspects de la vie. Mais ce n’est pas que culturel : en revenant on change de domicile, de travail, de fréquentations. Tout cela bouleverse notre vie et peut être source de solitude, d’insécurité, de frustration, voire de colère, envers ceux qui ne sont jamais partis, etc…

Le 9 : Comment les impatriés sont-ils touchés par ce phénomène ?

E. T. : Suivant que le retour ait été choisi ou imposé (par son conjoint par exemple), celui-ci peut s’avérer plus ou moins aisé. Par exemple, j'ai accompagné une jeune femme française qui vivait en Chine depuis plus de 10 ans. Elle s’était mariée à un chinois, puis avait divorcée. Elle n'éprouvait plus de plaisir au poste qu’elle tenait depuis 5 ans et ne s'entendait pas avec son supérieur. Elle a tout plaqué pour rentrer en France et reconstruire une nouvelle vie. Elle savait ce qu'elle ne voulait plus, mais ne savait pas encore ce qu'elle voulait faire. Une fois rentrée en France, elle pensait que son expérience en Chine allait la valoriser sur le marché du travail. C’est tout le contraire qui s’est passé : son expérience n'était pas reconnue, elle n'avait pas un parcours « standard ». À ce moment, elle a décidé de se faire coacher, nous avons remis à plat ses priorités et défini une stratégie avec des actions concrètes : faire un bilan de ses expériences, définir ses souhaits d'évolution, retravailler son CV et son profil LinkedIn, générer des contacts, décrocher des entretiens, négocier son contrat, réussir sa prise de poste et enfin tisser des relations avec ses nouveaux managers et collègues. L'accompagnement s'est déroulé sur 4 mois, 1 mois après elle commençait son nouveau job.

Le 9 : Est-ce que l'intensité du choc dépend de l'écart culturel entre les pays ?

E. T. : Il s’agit plutôt de comment chacun aborde les transitions et de son niveau d’intégration dans le pays d’accueil. Les différences de cultures marquées ont une importance mais ce ne sont pas les seules.

Le 9 : Comment une personne peut-elle perdre ses repères aussi rapidement, au point de devoir se réadapter au retour et malgré le fait d'avoir passé la majeure partie de sa vie dans son pays ?

E. T. : Arriver dans un nouveau pays force à s’adapter vite, qu’on le veuille ou non (déménagement, faire ses courses, se déplacer, etc…), mais cela permet aussi d’élargir nos perspectives. On remarque que d’autres façons de faire que celles de son pays sont possibles. Lorsqu’on rentre, on a un nouveau regard sur son pays, on peut en apprécier ou ne plus supporter certains aspects. Ce n’est pas tant les repères qui changent mais la façon dont on les voit.

Le 9 : Combien de temps peut prendre la réadaptation à sa culture d'origine ?

E. T. : C’est variable selon l’intensité du choc, le fait de le vivre pour la première fois ou non, d’être plus ou moins entouré, etc… Des études ont montré que ce phénomène, aussi appelé Re-Entry Shock, peut durer jusqu’à 2 ans !

Le 9 : Quels conseils leur donnez-vous ?

E. T. : Entourez-vous, ne restez pas isolé ! Vous avez toujours la possibilité de rencontrer des profils susceptibles de s’intéresser à vous, des personnes qui ont vécu à l’étranger et d’intégrer des réseaux internationaux.

Entretien réalisé par Shanshan Zhu

Contact :

Evelyne TAN-BROUARD

Coach professionnelle certifiée

evelyne@indeve.fr

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