
« Black tea », film du cinéaste mauritanien Adberrahmane Sissako (en salle)
Synopsis
Aya, une jeune femme ivoirienne d’une trentaine d’années, dit non le jour de son mariage, à la stupeur générale. Émigrée en Chine, elle travaille dans une boutique d'export de thé avec Cai, un Chinois de 45 ans. Aya et Cai tombent amoureux. Black tea est le premier film africain sur une mondialisation de ce « Sud Global » dont les protagonistes sont avant tout des Chinois et des Africains.
Le film commence avec une chanson de Nina Simone, montre la richesse vestimentaire des femmes ivoiriennes avant de nous transporter à Canton où l’héroïne de ce film, jouée par l’actrice Nina Mélo, s’initie aux métiers du thé auprès de Cai, patron d’une plantation de thé. Son rôle est interprété par Zhang Han, acteur célèbre originaire de Taïwan. Si le film présente des maladresses de scénario, il n’en décrit pas moins une réalité sociologique importante et généralement méconnue du public francophone. Canton, au même titre que la ville de Yiwu, plus au nord, dans la province du Zhejiang abrite des communautés africaines et musulmanes de marchands, parmi lesquels des Mourides venus du Sénégal mais aussi des Maghrébins. La globalisation n’est pas qu’une question d’investissements, de pouvoir et d’influence, c’est aussi une aventure humaine et des histoires d’amour mixtes dont l’histoire n’est que rarement abordée. Combien sont ces filles et fils d’expatriés nés de rencontres parfois fortuites, parfois désirées mais dont la double appartenance culturelle reste encore un tabou très largement partagé ?
Il y a dans le film de Adberrahmane Sissako une dimension encore trop largement ignorée et qui est celle correspondant à une géopolitique du désir. Le cinéaste nous conduit des champs de théier du sud de la Chine à l’Afrique de l’Ouest et au Cap-Vert dans un accompagnement musical et de langues qui change notre regard sur les relations internationales. Un film qui nous dit aussi qu’une autre histoire universelle et qu’un autre humanisme sont possibles, avec tous les écueils et les moments de tendresse que l’on pourra imaginer. En somme, l’histoire du monde ne s’écrit plus seulement par la seule médiation ou le regard des Occidentaux. Un film aussi profond qu’intelligent sur le grand décentrement du monde et des sentiments.
BLACK TEA
Réalisé par Adberrahmane Sissako
Avec Nina Melo, Han Chang, Wu Ke-Xi
Genre : Drame / Romance
Durée : 1h49
Photo : Black tea / Gaumont
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