Un nouvel an pas comme les autres
Ça y est, c’est de nouveau la fête du Printemps. Cette année pourtant, ça
n’a pas la même saveur. Il y a un an, le début du Nouvel An chinois, c’était
encore les grands banquets familiaux, les pétards, les défilés de dragons en
papier. En ce mois de février en revanche, les Chinois ne sont pas à la
fête. Personne n’a oublié que c’est justement lors du dernier Nouvel An que
s’était propagée la Covid-19, semant la désolation dans toute la Chine, puis
dans le monde entier. Cette année, les célébrations du passage à l’année
du « Bœuf de Métal » apparaissent donc placées sous le signe de la
prudence.
Dans l’astrologie chinoise,
le Bœuf est un symbole de puissance et de détermination, de prospérité et de
réussite. Pour entrer pleinement dans cette nouvelle année prometteuse et
oublier 2020, les Chinois fournissent un dernier effort. D’habitude, comme
chaque année, des centaines de millions d’entre eux prennent d’assaut les
transports pour retrouver leurs familles dans leurs provinces natales : c’est
le traditionnel « voyage du printemps » (chunyun
春运). Cette année, beaucoup de Chinois ne rentreront pas.
Beaucoup de travailleurs resteront en ville, beaucoup d’étudiants resteront à
l’université. Pour les plus motivés, le voyage et les fêtes devront
s’accommoder des gestes barrières. Pas de confinement donc, mais une dernière
ligne droite, un dernier sacrifice collectif, pour tourner la page de l’année
du « Rat de Métal », et pour éviter que le cauchemar ne se répète.
La nouvelle tendance : rester sur son lieu de travail
Comme à
l’accoutumée, le Conseil des Affaires de l’État a publié les dates des
vacances du Nouvel An chinois sur son site internet. Du 11 février au 17
inclus, les Chinois bénéficieront de l’une de leurs « semaine d’or », une
semaine de congés pour les festivités de la fête du Printemps. Les
épidémiologistes chinois mettent cependant le pays en garde : les vacances du
printemps n’auront rien de commun avec les vacances de cet été ou celles du
1er octobre dernier. L’intervention de Zhang Boli, spécialiste de médecine
traditionnelle et membre de l’Académie chinoise d’ingénierie qui s’exprimait
sur Beijing TV le 3 janvier, a donc été suivie avec beaucoup
d’attention : « Le grand froid de cet hiver
peut faire survivre le virus. Il faudra faire preuve de prudence, au moins
jusqu’au début du printemps. De nouveaux cas de Covid-19 sont à déplorer en
Chine depuis plusieurs semaines, certains Chinois sont revenus de l’étranger
pour les fêtes et il faut se méfier des cas asymptomatiques. » Pour Zhong
Nanshan, le célèbre épidémiologiste que l’on ne présente plus, il faudra
surtout faire attention aux gestes barrières pendant les vacances et éviter
de se rendre à l’étranger.
Le 30 décembre,
la Commission nationale de la santé formulait aussi ses recommandations. Même
son de cloche : les vacances de printemps auront valeur de test et la menace
vient de l’étranger. La période du Nouvel An chinois apparaît comme une
période à risque, notamment parce que de nombreux produits congelés sont
importés pour les grands repas de famille. On se souvient qu’en juin dernier,
des traces du virus avaient été détectées au marché de Xinfadi à Pékin,
dans les étalages de saumon importé (
Un Nouvel An plus près de chez soi
Dans les universités,
la traditionnelle période du Nouvel An sert à faire la transition entre les
deux semestres de cours. Cette année, une directive du ministère de
l’Éducation a exhorté les universités à décaler les dates des vacances,
afin d’éviter de fortes affluences dans les transports. Selon le média
chinois Global Times, en principe, de nombreux étudiants et membres du
personnel enseignant ne rentreront donc pas chez eux pendant les vacances. À
titre d’exemple, la South Central University for Nationalities de Wuhan, ville
de l’épicentre du virus en janvier dernier, a avancé les vacances scolaires
au 4 janvier, soit 20 jours plus tôt que l’année dernière (China News).
Toutes ces
mesures incitent finalement les Chinois à passer les fêtes à proximité de
leur lieu de travail, ou non loin de leur résidence habituelle. Selon le South China Morning Post (SCMP), qui donne les chiffres du site chinois de voyage
qunar.com, beaucoup de voyageurs cherchent une destination située à moins
d’une heure de chez eux. Une tendance qui s’est ressentie au niveau du prix des
billets d’avion, qui ont chuté de 20 % par rapport à la même période l’an
passé. Seules les réservations d’hôtel ont augmenté, mais seulement de 1,8
%.
Pour ceux qui rentrent : retour aux gestes barrières
Cet été, la
Chine avait fait parler d’elle pour son abandon progressif des gestes
barrières. À Wuhan, les grands rassemblements comme les concerts étaient à
nouveau autorisés. Les masques n’étaient plus obligatoires dans les lieux
publics. En décembre dernier, la Commission nationale de la santé a donc
surpris le public chinois en annonçant
le retour aux gestes barrières pour le Nouvel An. Port du masque dans les
lieux clos, limitation à 10 personnes autour de la table au moment des fêtes,
limitation des seuils d’occupation à 75 % dans les lieux accueillant du
public.
Après les mesures barrières, la course aux
vaccinations...
Si la Chine en
revient aux mesures barrières, la campagne de vaccination était aussi très
attendue. À long terme, seule cette stratégie pourra protéger la Chine du
retour de la pandémie. Sur ce point, le pays avance très vite : selon le Global Times, au début du mois de janvier, le gouvernement projetait
de vacciner 50 millions de Chinois avant les vacances du Nouvel An. La Chine
s’appuie sur ses deux vaccins nationaux, développés par Sinopharm et Sinovac
(Cf. Le 9 n°31, septembre 2020). Le printemps 2021 sera donc celui
de l’espoir. Il est capital que cette campagne de vaccination fonctionne. En
effet, selon les chiffres du Conseil des Affaires de l’État, le nombre de
nouvelles contaminations quotidiennes est reparti à la hausse depuis la fin novembre.
Une première depuis le mois de juillet.
Photo : Traditionnellement en Chine, les fêtes de Nouvel
An sont une période d'intenses migrations dans tous le pays. Cette année, ces
mouvements de population pourraient être fortement limités. © Liu
Dawei/Xinhua
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