Zhongzhou : l'axe central de Pékin, témoin de la civilisation chinoise

1650643711655 China News Service

En 2021, l'UNESCO a examiné la demande d'inscription du quartier pékinois Zhongzhou au patrimoine mondial, précipitant sa candidature dans une phase de sprint. 

L'axe central de Zhongzhou, combinaison d'immenses bâtiments et d'espaces urbains de 7,8 kilomètres de long, est une zone centrale symbolique et cérémonielle de la capitale, mêlant rythme et harmonie. Ce symbole de la civilisation orientale s'est développé pendant plus de 700 ans. 

En matière d'urbanisme, quelle est la différence entre le concept traditionnel chinois incarné par l'axe Zhongzhou et celui de l'Occident ? Quelle est l'importance au niveau mondial de la candidature du quartier pékinois de Zhongzhou ? Dans l'avenir, comment la Chine va-t-elle promouvoir la question du patrimoine mondial ? Comment jouer un plus grand rôle dans la protection du patrimoine et le développement durable ? Pour répondre à ces questions, China News a mené une interview exclusive avec le professeur LU Zhou, directeur du Centre du patrimoine national de l'Université Tsinghua et viceprésident de l'Association chinoise pour la protection des monuments et des sites. 

© Compte Weibo du Musée du Palais

China News Service : Selon vos propos, le quartier Zhongzhou à Pékin incarne l'esprit culturel et la pensée philosophique traditionnelle chinoise, caractérisés par la mise en avant de la notion de « centre » et par la recherche de la beauté de la symétrie. Si l'on compare la Chine et l'Occident, quelle est la différence entre cette vision et la construction traditionnelle d'une capitale en Occident ? Quelle est l'importance mondiale de la candidature du quartier pékinois de Zhongzhou ? 

LU Zhou : L'axe central de Zhongzhou est un témoignage unique de la civilisation et des traditions culturelles chinoises. C'est la base même de sa candidature au patrimoine mondial. La plupart des villes chinoises anciennes apparaissent comme des centres dirigeants, caractérisés par un modèle d'urbanisme clair. Le quartier Zhongzhou en est la forme la plus marquante. En comparaison, la plupart des villes occidentales, formées sur la base du commerce et de l'artisanat, reflétaient les caractéristiques de la croissance libre. C'est une différence entre les civilisations orientale et occidentale. 

La relation entre politique et religion en Occident détermine les choix de son aménagement urbain. Les églises, les marchés et les mairies jouent un rôle important dans la ville alors que les palais des princes et des nobles ne sont qu'un pôle urbain parmi d'autres. En revanche, les anciennes villes chinoises ont développé des spécificités basées sur une hiérarchie urbaine. Dès le début de la dynastie des Zhou de l'Ouest, à l'apogée de la construction des villes, est apparue la question de la hiérarchie urbaine. En tant que cœur de la capitale nationale, le quartier Zhongzhou concentre les bâtiments les plus importants du pays et forme le complexe immobilier le plus élevé de Chine. 

La notion de « centre » a toujours été fortement mise en avant dans la culture traditionnelle chinoise, comme en témoigne l'axe central Zhongzhou à Pékin. Ce concept englobe également la relation ancestrale entre l'homme et le ciel. La culture chinoise met l'accent sur l'influence de l'ordre céleste sur les êtres humains. Elle croit qu'il est nécessaire de « suivre le mandat du ciel » et d'apporter l'ordre céleste aux humains à travers les rites. L'axe Zhongzhou reflète la relation hiérarchique existant entre la capitale idéale et la société humaine, essentiellement basée sur le Tao du Ciel. Par conséquent, la notion de « milieu » ou « centre » n'est pas seulement géométrique, mais revêt également une signification conceptuelle. 

Par ailleurs, l'élaboration de l'axe central de Pékin est unique dans l'histoire du développement des capitales chinoises. La plupart des capitales des dynasties Han et Tang, centrées sur les palais, ont influencé les formes urbaines des capitales de l'Asie de l'Est, comme Nara et Kyoto au Japon. Lors de la construction de Pékin (Dadu) sous la dynastie Yuan, dans un premier temps, le centre de la ville a été choisi, puis l'orientation et l'emplacement du palais ont été décidés. Le groupe de constructions ainsi constitué sur l'axe central a déterminé la forme entière de la ville. Ce type d'urbanisme est unique au monde. 

© Compte Weibo du Musée du Palais

CNS : Selon vos propos, l'axe central de Pékin témoigne de la formation de l'unité et de la pluralité de la nation chinoise. Sur l'axe central Zhongzhou, quelles sont les expressions marquantes de la diversité ? Comment favoriser la formation de l'unité ? 

LU Zhou : Lors de la construction de Pékin (Dadu), la dynastie Yuan a suivi la forme urbaine décrite dans le Kaogongji de Zhou Li, les empereurs de la dynastie Yuan se considérant comme les héritiers légitimes de la civilisation chinoise. Il convient de noter qu'avant Dadu construite sous la dynastie Yuan, aucune capitale n'avait été entièrement érigée selon le Kaogongji de Zhou Li

Pendant l'ère Jiajing de la dynastie Ming, l'axe Zhongzhou s'étendait sur 7,8 kilomètres. La dynastie Qing a encore renforcé l'influence de l'axe central sur la forme urbaine. Par exemple, en construisant cinq pavillons dans le parc Jingshan, Qianlong a redéfini le quartier Zhongzhou comme contour de la ville. Sous les dynasties Yuan, Ming et Qing, la création, le développement et le renforcement de l'axe central de Pékin et son respect de la hiérarchie urbaine établie sous la dynastie Zhou il y a trois mille ans, ont clairement exprimé la continuité de la civilisation chinoise à travers des milliers d'années. 

L'axe Zhongzhou reflète également l'unité plurielle des croyances chinoises : le Temple du Ciel dédié à Shang Di ; le Temple de l'Agriculture dédié au vent, à la pluie, au tonnerre et à la foudre, aux montagnes et rivières célèbres, aux divinités des eaux, au dieu de l'agriculture et à Toshigami ; la tour Qiwang dédiée à Confucius ; le temple Guandi sur le côté est de la barbacane de Zhengyangmen et le temple Guanyin sur le côté ouest ; la salle Qin'an de la Cité interdite dédiée à l'empereur Zhenwu ; le pavillon Wanchun dans le parc Jingshan dédié au bouddha Vairocana. Tout ceci reflète également l'inclusivité de la culture traditionnelle chinoise. 

© Compte Weibo de la commission pour l'inscription de « Zhongzhou » au patrimoine mondial 

CNS : La Chine a été élue et réélue membre du Comité lors de l'Assemblée générale des États parties à la Convention du patrimoine mondial qui s'est tenue en 2017. Comment évaluezvous le travail et le rôle de la Chine lors de son dernier mandat de de 2018 à 2021 ? 

LU Zhou : C'est la quatrième fois que la Chine est élue. Au fil des ans, la Chine a appris à maîtriser les règles du patrimoine mondial et s'est forgé une vaste expérience. Durant ce mandat, elle a fait preuve d'un haut niveau de professionnalisme. Dans une certaine mesure, elle a commencé à jouer un rôle de chef de file. Les experts chinois sont également plus actifs dans la participation et l'organisation d'activités professionnelles sur les sites du patrimoine mondial, la valeur académique de ces activités ayant été largement saluée. 

CNS : En 2022, la Convention du patrimoine mondial célébrera son 50e anniversaire. Dans l'avenir, comment la Chine va-t-elle promouvoir la question du patrimoine mondial ? 

LU Zhou : Dans l'ensemble, le consensus humain a toujours existé. Par exemple, « l'effet wow » provoqué par les objets à valeur patrimoniale mondiale est un consensus. Face à de très belles choses, les gens ne peuvent s'empêcher de s'exclamer « wow ». Malgré leurs différences de culture et de vie, dans la plupart des cas, à travers des échanges et des dialogues, un consensus peut exister chez les êtres humains, une compréhension mutuelle et la consolidation de la paix peuvent être construites. C'est aussi la portée du patrimoine mondial. 

Cet article a été initialement publié en chinois sur Chinanews.com.cn

Photo du haut © wikimedia commons

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