Les grottes de Yungang, un symbole des échanges culturels entre la Chine et l’Occident

1654173211101 China News Service

Les grottes bouddhiques de Yungang ont été sculptées entre le milieu du 5e siècle et le début du 6e siècle de notre ère. Composées de 252 grottes et niches et abritant 51 000 statues dans une zone sculptée dans la roche d’une superficie de 18 000 m2, les grottes de Yungang sont une réussite exceptionnelle de l’art rupestre bouddhique en Chine. Ce site magnifique est également un symbole à lui-seul : celui d’une Chine antique marquée par un fort brassage culturel. Selon Hang Kan, directeur de l’institut de recherche sur les grottes de Yungang, spécialiste du bouddhisme, des dynasties Song et Yuan, ce patrimoine multiculturel a joué un rôle dans le dialogue entre la Chine et le monde. Dans un article pour China News, il revient sur l’histoire de ces grottes et sur leur forte dimension symbolique. 

La dynastie des « Wei du Nord » : berceau des premières grottes de Yungang

Pour comprendre l’histoire des grottes de Yungang, il faut revenir à l’histoire de la Chine antique, il y a plus de 1 500 ans. En 304 de notre ère, Liu Yuan, issu des tribus nomades des Xiongnu, levait ses armées dans la ville de Lishi (aujourd'hui Lishi, Shanxi) pour établir la dynastie Han. En 316, son fils Liu Cong faisait à son tour la conquête de Chang'an, détruisant la dynastie des Jin occidentaux et marquant le début d’une période de 100 ans de lutte fratricide entre les souverains de la région. C’est la période des Seize Royaumes (316-439).

Au plus fort de cette époque salvatrice pour l’avenir de la Chine, en 398, l'empereur Daowu, plus connu sous le nom de Tuoba Gui, fondait la dynastie des Wei du Nord, avec pour capitale la ville de Pingcheng (l’actuelle ville de Datong). Le territoire de la nouvelle dynastie s’étendait ensuite à la faveur des grandes conquêtes. En 439, c’est ainsi que le petit-fils de Tuoba Gui, l’empereur Tuoba Tao, mène une offensive militaire pour unifier les régions de la Chine du nord. Il s’empare de la ville de Liangzhou (aujourd’hui la préfecture de Wuwei, dans le Gansu). C’est sous le règne de cette dynastie et avec le soutien de la famille impériale des Wei du Nord, que le moine bouddhiste Tan Yao lança les premiers travaux d’excavation des grottes de Yungang. En 460, les premières grottes étaient ainsi creusées dans les alentours de la ville de Pingcheng. 

Un lieu placé sous le signe de l’apaisement entre les communautés

Le régime des Wei du Nord avait réussi à unifier de nombreux petits royaumes, il avait mis fin à la guerre dans le bassin du fleuve jaune, berceau de la civilisation chinoise. Pour autant, le nouveau pouvoir n’avait pas réussi à mettre un terme définitif aux tensions entre les différentes ethnies peuplant la région. Afin d’apaiser les relations entre celles-ci et d’instaurer la concorde, les dirigeants des Wei du Nord ont donc finalement eu recours au bouddhisme. La ville de Pingcheng, qui se situait alors au carrefour de plusieurs civilisations, apparaissait comme le point de départ des routes de la soie de la dynastie des Wei du Nord. Selon le livre des Wei, (livre historique chinois compilé par Wei Shou), c’est d’ailleurs depuis Pingcheng que démarraient les routes menant à l’Occident. Pendant la période de l’unification des royaumes du nord, Pingcheng est devenue une ville de plus en plus diversifiée. On y recensait déjà plus d’un million d’habitants, c’est vers elle que convergeaient tous les flux de population du territoire des Wei du Nord. 

En 1933, les archéologues et les historiens ont mené de nombreuses recherches sur le site. Ils ont découvert que les échanges entre la ville de Pingcheng et l’Occident étaient loin de se limiter au commerce. Liang Sicheng, Lin Huiyin et Liu Dunzhen, membres de la Société pour l’étude de l’architecture chinoise, ont mené des recherches minutieuses dans les grottes de Yungang. Ils se sont plus précisément intéressés à l’architecture et à la décoration. Dans leurs travaux, ils ont souligné que certaines sculptures des grottes étaient d’influence occidentale, en l’occurrence grecque, tandis que d’autres étaient marquées par l’art bouddhiste indien. Les grottes de Yungang figurent donc comme une trace de l’introduction du bouddhisme indien en Chine, mais aussi de l’art européen. Les cultures se sont ainsi mélangées, et les influences occidentales et bouddhistes n’avaient d’ailleurs en rien dénaturé l’art authentique chinois également présent dans les grottes. 

Un patrimoine commun à toute l’humanité

Après la fondation de la République populaire de Chine en 1949, le passage par les grottes de Yungang est devenu un incontournable des visites diplomatiques de nombreux dirigeants internationaux en Chine. En 1973, le premier président français à se rendre en Chine populaire, George Pompidou, avait par exemple visité les grottes de Yungang en compagnie du Premier ministre chinois Zhou Enlai. En mai 1977, c’était au tour de la Princesse Beatrix Wilhelmina Armgard des Pays-Bas et son mari le Prince Claus von Amsberg. Plus récemment en 2015, c’était aussi le cas du roi Willem-Alexander des Pays-Bas, accompagné de la reine Máxima Zorreguieta des Pays-Bas. 

À partir de 1974, les autorités chinoises ont commencé à investir massivement pour protéger ce patrimoine. Elles ont mis sur pied un programme de réhabilitation des grottes principales, qui s’est étendu sur une période de trois ans. Un effort couronné de succès puisque finalement, en décembre 2001, les grottes de Yungang ont été inscrites au patrimoine mondial de l'UNESCO. Le Comité du patrimoine mondial avait alors déclaré que les cinq cavernes de Tan Yao constituent même une œuvre classique du premier « âge d’or » de l’art bouddhique chinois. Au fil des décennies, les dirigeants de nombreux pays du monde ont visité les grottes : notamment ceux du Royaume-Uni, du Mexique, du Bhoutan, de la Thaïlande, d'Uruguay, contribuant à populariser le site à l’international. Les grottes de Yungang ont donc la même fonction dans la Chine antique que dans la Chine actuelle : elles symbolisent la paix et la fraternité entre les peuples. 

Cet article a été initialement publié en chinois sur Chinanews.com.cn.

Photo : Xinhua


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