Quel thé a voyagé sur la Grande route du thé Wanli via la Chine, la Mongolie et la Russie ?

1674214997146 China News Fu Jingyi, Liu Ganggui

La Grande route du thé Wanli, longue de 14 000 kilomètres, est une longue et ancienne route commerciale dont le thé était la marchandise principale. En 2013, afin de faire revivre cette route, la Chine, la Mongolie et la Russie ont conjointement pris l’initiative de demander à ce qu’elle rejoigne la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. En 2019, la Grande route du thé Wanli a été inscrite sur la « liste préliminaire des sites du patrimoine culturel mondial de Chine ».

Quel thé empruntait cette Grande route du thé via la Chine, la Mongolie et la Russie ? Il s’agissait essentiellement du thé noir. Le district d’Anhua, dans la province du Hunan, est le berceau du thé noir chinois, de l’ancienne Route du thé et des chevaux et de la Grande route du thé Wanli. Le thé noir d’Anhua est apparu dans les régions russes et mongoles vers la fin de la dynastie Yuan et le début de la dynastie Ming. Il a été désigné thé officiel pendant la période Wanli (dynastie Ming, 1573-1620), avant d’être exporté vers le nord-ouest. Comment une ancienne « feuille d’Orient » a-t-elle tissé le voyage légendaire de la Grande route du thé Wanli ? Jiang Yuedeng, vice-président exécutif de l’Association provinciale du thé du Hunan et auteur de L’Anthologie du thé de Chine - Volume sur le thé noir d’Anhua, a récemment accordé une interview à China News pour nous apporter son éclairage.

Pourquoi dit-on que le thé noir d’Anhua est l’ancêtre du thé noir chinois ? Quelles ont été les étapes de développement du thé noir chinois ?

Le thé noir chinois est un thé relativement spécial, qui se caractérise principalement par une fermentation après flétrissage. Son transport sur une longue distance nécessitait généralement une compression, pour en réduire le volume et en maîtriser le poids. Historiquement, le thé noir satisfaisait les besoins alimentaires des peuples nomades du nord-ouest et des populations étrangères en matière de fibres alimentaires et d’apport en oligo-éléments. En outre, son commerce était généralement mené par le gouvernement, sous la forme de thé officiel ou commercial, en énormes quantités.

Le thé noir d’Anhua a été le premier à satisfaire ces trois critères. Depuis la fin de la dynastie Tang, Anhua était connue du monde extérieur pour ses théiers qui « poussent d’eux-mêmes sans qu’on ait besoin de les planter, près des falaises et de l’eau ». À la fin de la dynastie Tang, les qujiang baopian (pièces de monnaie de la rivière Qu) produits à Anhua étaient des thés compressés en forme de sapèques, dont « 80 pièces pesaient une livre ». Au milieu et à la fin de la dynastie Ming, le thé d’Anhua dont le transport était aisé est devenu le thé officiel. À son apogée, il a atteint une production annuelle de milliers de tonnes. Les documents historiques de cette époque ont alors utilisé l’appellation de thé noir pour parler du thé transportable produit à Anhua. C’est la première fois que le terme de thé noir apparaissait.

Le développement du thé noir a débuté précocement en Chine, avant la dynastie Ming. Le processus de production complet était alors en cours d’exploration et le système traditionnel des produits à base de thé noir n’avait pas encore pris forme. Il n’était produit qu’à Anhua dans le Huguang, à Ya’an dans le Sichuan et à Hannan dans le Shaanxi. Les dynasties Ming et Qing ont connu l’apogée du développement du thé noir. Le processus de production était alors à maturité, le système traditionnel des produits à base de thé noir était essentiellement formé, les zones de production se sont étendues au Yunnan, au Guangxi, au Fujian et au Hubei et la production se vendait à l’étranger. Depuis le XXe siècle, la fabrication du thé noir en Chine a progressivement évolué vers la mécanisation et la modernisation, l’exploitation est passée d’un monopole officiel à une marchandisation.


Pourquoi dit-on que les marchands du Shanxi et les producteurs de thé d’Anhua ont ouvert conjointement la Grande route du thé Wanli, partant d’Anhua jusqu’à Kiakhta, à la frontière sino-russe ?

Il existe trois grandes routes du thé en Chine et à l’étranger, à savoir la Grande route du thé Wanli via la Chine, la Mongolie et la Russie, la Route maritime du thé et la Route du thé qui longe la route de la soie. Lors de l’ouverture et de l’exploitation de la Grande route du thé Wanli via la Chine, la Russie et la Mongolie, les marchands du Shanxi et les producteurs de thé d’Anhua ont établi ensemble une chaîne industrielle complète de production, de transport et de commercialisation du thé, depuis le pré-achat des plantations de thé jusqu’au raffinage, au transport des produits à base de thé et à la gestion de l’industrie. Ils ont également élaboré des réglementations régissant l’industrie et le fonctionnement de la Grande route du thé Wanli, comme le « Précis de l’héritage des marchands itinérants », des stèles d’interdiction industrielle et la régulation du transport par voie fluviale.

Les marchands du Shanxi et les producteurs de thé d’Anhua ont aussi participé, et même dirigé, diverses transformations qui ont marqué l’ouverture et le fonctionnement de la Grande route du thé Wanli, comme l’abolition du Département des chevaux et du thé au début de la dynastie Qing, remplacé par le « Thé commercial », le soutien logistique au déploiement de troupes militaires dans le nord-ouest au milieu de la dynastie Qing, la réforme des Affaires du thé de Zuo Zongtang à la fin de la dynastie Qing et le troc et la gestion unifiés en République de Chine. Les marchands du Shanxi et les producteurs de thé d’Anhua ont également créé ensemble des produits traditionnels dérivés du thé noir dont la réputation n’est plus à faire, tels que les « trois pointes » (sanjian), les « trois briques » (sanzhuan) et les « rouleaux à motifs » (huajuan).

La Russie, la Mongolie et la Chine ont déposé une demande pour que la Grande route du thé Wanli soit classée patrimoine mondial de l’UNESCO. Étant l’un des principaux points de départ dans le sud, quels documents et preuves le district d’Anhua a-t-il fourni ?

La culture du thé noir du Hunan est l’une des origines de la Grande route du thé Wanli. En prenant Anhua comme point de départ, de la dynastie Song aux temps modernes, il existait déjà deux routes du thé allant de l’embouchure de la rivière Zijiang sur le lac Dongting jusqu’à Hankou, vers l’ouest via Xiangyang ou vers le nord via Sheqi. De la dynastie Song à la dynastie Ming, des canaux de contrebande du thé et de commerce de céréales ont été ouverts d’Anhua à Xinhua, Shaoyang, Chenzhou, Youyang et Guang’an. De la dynastie Song à la fin de la dynastie Qing, des routes du thé ont été maintenues d’Anhua à Xiangtan, puis à Guangzhou, par intermittence. Toutes ces routes commerciales ont fini par se fondre dans la Grande route du thé Wanli, voie de communication entre la Chine et le monde.

Les routes montagneuses d’Anhua sont accidentées et la circulation y est extrêmement difficile. Les marchands de thé du Shanxi et du Shaanxi et les producteurs locaux ont utilisé des méthodes primitives, comme le portage à dos d’homme ou de cheval, pour transporter le thé noir avant pressage jusqu’aux rives du Zijiang, où il était raffiné et traité, avant d’être expédié dans le monde entier. Ils ont ouvert plus de 300 maisons de thé et boutiques de thé à Anhua et ont participé à d’autres activités d’intérêt public telles que la construction de ponts, de routes et de temples. Il existe un grand nombre de vestiges relatifs à la culture du thé dans le district d’Anhua, comme d’anciennes plantations de thé, d’anciennes routes, d’anciens ponts en arc et ponts du vent et de la pluie (contre les intempéries), d’anciens ateliers de thé, d’anciennes bourgades, des manufactures de thé et d’antiques stèles, qui reflètent pleinement la prospérité d’antan du marché du thé sur la Grande route du thé Wanli.


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