Tout savoir sur l’incroyable boule en ivoire sculpté du Guangdong

1700657750381 China News
Conservée au musée du Guangdong, la boule en ivoire sculpté à onze couches appelée « Fushou Baoxianghua » – objet d’art du milieu de la dynastie Qing (1644-1911) – est l’une des sculptures sur ivoire les plus représentatives de cette province. Ingénieusement conçue, la boule sculptée est l’illustration d’un savoir-faire délicat et extrêmement complexe. Une création de génie !

Pourquoi cette boule sculptée sort-elle du commun ? Comment des boules sculptées du Guangdong telles que celle-ci ont-elles été exportées vers l’Occident à travers les « routes de la soie maritimes » ? Il fut un temps où les boules d’ivoire sculpté suscitaient l’engouement des Occidentaux : pourquoi ? Ruan Huaduan, directeur adjoint du musée du Guangdong, et Yina, conservatrice-assistante, l’expliquent dans leur interview pour China News.

En tant que l'un des « trésors » du musée du Guangdong, à quel genre de reliques culturelles appartient « Fushou Baoxianghua », la boule en ivoire sculptée à onze couches de la dynastie Qing ? 

Cette boule sculptée a été transmise au musée du Guangdong par le Comité de gestion des reliques culturelles du Guangdong en novembre 1961. Elle a été sculptée selon une technique d’ajourage de l’ivoire sur plusieurs couches. La surface de la boule en ivoire est sculptée de fleurs « baoxiang », de chauves-souris et de huit motifs symétriques représentant des caractères signifiant la longévité. À l’intérieur de la boule, on trouve plusieurs boules ajourées qui s’emboîtent, décorées de motifs géométriques complexes mais très esthétiques. À travers les quatre trous ronds de la surface de la boule, on peut apercevoir les différentes couches de boules dont chacune peut pivoter sur elle-même. Sur l’extrémité supérieure de la boule, une anse permet l’accrochage facile, et l’extrémité inférieure est décorée de nœuds chinois et de pompons.

Pourquoi cette boule en ivoire – chef d’œuvre représentatif des boules en ivoire sculpté du Guangzhou du milieu de la dynastie Qing – est-elle si précieuse ?

D’abord, cette boule reflète le niveau de sculpture sur ivoire exceptionnellement élevé du Guangzhou sous la dynastie Qing. C’était une période prospère en matière de sculpture sur ivoire. Celles de Jingzuo, Suzhou et Guangzhou avaient chacune ses caractéristiques. Quant à la boule d'ivoire, elle représente les spécificités de la sculpture sur ivoire du Guangzhou. Ensuite, elle est magnifiquement sculptée et ajourée, avec des caractéristiques typiquement régionales et propres à son époque. Chaque détail résiste à un examen minutieux et revêt une importante valeur historique et artistique. Enfin, cette boule contient onze couches imbriquées de boules qui peuvent pivoter indépendamment les unes des autres. C’est une œuvre d’art qui comporte un nombre de couches de boules parmi les plus élevées jamais vu jusqu’à présent. C’est aussi un élément physique important pour la recherche sur les boules d’ivoire.

Dans son livre Voyages en Chine (Travels in Chine) publié en 1802, John Barrow, un des membres de la mission britannique Macartney écrivait : « Parmi les arts ingénieux dans lesquels excellent les Chinois, celui qui atteint le plus haut niveau de performance est la sculpture sur ivoire. En la matière, [les Chinois] sont inégalés… Pour la sculpture, ils utilisent une boule d’ivoire ; dans un trou de moins d'un demi-pouce, il y a neuf à quinze couches de boules, emboîtées les unes dans les autres, qui peuvent toutes tourner. »

Comment les sculptures d’ivoire du Guangzhou sont-elles apparues ? Et comment sont-elles arrivées en Occident avec le commerce dans le cadre des « Routes maritimes de la soie » ?

Dans le Guangzhou, cinq défenses d’éléphant d'Afrique vieilles de plus de 2000 ans ont été découvertes dans la tombe du roi Nanyue (176-125 av. J.-C.) de la dynastie des Han de l’Ouest (202 av. J.-C. - 8 après J.-C.). Sous la dynastie Tang (618-907), le commerce d'importation et d'exportation d'ivoire de Guangzhou a prospéré, comme en témoigne un poème de Wang Jian : « Boutique de têtes de dragon près des postes de contrôle aux frontières, commerce de défenses d’éléphant sur le port (du Guangdong) ». Au cours des dernières années, on a découvert le portrait d’un étranger finement sculpté (il s’agit peut-être un sceau) sur les strates de la dynastie Tang (618-907) et des Cinq dynasties (907-979). À cette époque, la zone urbaine de Guangzhou vit se former un centre de distribution pour l'achat et la vente de produits en ivoire, et l’ancienne rue appelée « Rue de l'Ivoire » subsiste toujours dans la vieille ville.

À l’avènement d'une nouvelle ère du commerce maritime mondial, la province du Guangzhou s’imposa peu à peu comme un important point de départ pour le commerce maritime. Dans le même temps, « la mode chinoise » (« chinoiseries ») fit son apparition en Europe et les produits de sculpture en ivoire de Guangzhou arrivèrent en Occident avec le commerce dans le cadre des « Routes maritimes de la soie ». Des artisans chinois fabriquèrent des produits répondant aux besoins des clients étrangers, tels que des éventails, des étuis pour cartes de visite, des meubles et divers ustensiles. Comme le montre la collection du musée du Guangdong, parmi les sculptures sur ivoire exportées vers les États-Unis figuraient jeux d'échecs, éventails pliants, jeux de boules multicouches, coffrets de toilette, boîtes à couture, paniers avec anse, boîtes à cartes de visite et porte-lettres, pour n'en citer que quelques-uns. Au milieu du 19e siècle, les produits en ivoire étaient souvent présents dans les expositions à l’étranger. Ainsi par exemple, lors de l’Exposition de Philadelphie en 1876, on pouvait admirer des paniers avec anse en ivoire, des tours en ivoire, des bateaux-dragons en ivoire. Et en 1915, lors de l'Exposition universelle de Panama à San Francisco, Weng Zhao, l’expert en sculpture sur ivoire de Guangzhou remporta la médaille d'or pour sa boule d’ivoire sculptée à 25 couches.

Article traduit du chinois, initialement publié sur Chinanews.com.cn.

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