« Huagudeng », la danse des « lanternes et des tambours » reconnu comme étant le « ballet d’Orient »
Le huagudeng ou « Lanternes et tambours de fleurs » est une forme d’art complète dominée par la danse, répandue dans le bassin de la rivière Huai. Il est inscrit sur la première liste nationale du patrimoine culturel immatériel depuis 2006. « Orchidée de la vallée de la Huai », le premier ministre Zhou Enlai a qualifié le huagudeng de « ballet d’Orient ».
Quelle est donc l’origine du huagudeng ? Quelles sont ses caractéristiques ? Li Yuyu, directeur adjoint de l’École de danse de l’Université des arts de l’Anhui, a récemment accordé une interview exclusive à China News, dans laquelle il nous en apprend davantage sur ce trésor artistique.
Quelles sont les origines du huagudeng ? Pourquoi est-il populaire dans la vallée fluviale de la Huai ?
Les opinions divergent quant à l’origine et à l’histoire de la danse huagudeng. La recherche académique a privilégié différentes pistes en s’appuyant sur la littérature, les classiques et des sources documentaires diverses, que l’on peut résumer comme suit :
Pour certains, le huagudeng remonterait à la dynastie Xia et proviendrait du royaume de Tushan, sur les rives de la Huai. C’est à cet endroit, que l’on appelle aujourd’hui « district de Yuhui » que Dayu rencontrait ses vassaux. Le peuple a d’ailleurs édifié le temple Yu Wang (« du roi Yu ») sur le mont Tushan, en l’honneur de Dayu. Ce point de vue est corroboré par l’organisation de spectacles de huagudeng le 28 mars de chaque année pendant la fête du temple Yu Wang.
D’autres suggèrent que l’origine du huagudeng remonte à la dynastie Tang, durant laquelle les empereurs prisaient les lanternes. La légende veut que Wang Jintang, artiste folklorique de la troupe des lanternes de la ville de Shuangliu, ait chanté « L’empereur de la dynastie Tang joue aussi avec des lanternes rouges » lors du Don des lanternes. De nombreux artistes folkloriques de shuochang (spectacle populaire chanté et parlé) font aussi référence à « Xue Gang et à la rébellion des lanternes de fleurs ». On pense que les « lanternes de fleurs » sont à l’origine des « lanternes et tambours de fleurs ».
Ceux qui soutiennent que l’origine du huagudeng remonte à la dynastie Song s’appuient sur les Chroniques de Fengtai, dans lesquelles on lit : « Le huagudeng a une longue histoire. Dès la dynastie Song, il était répandu dans le bassin de la rivière Huai, aux environs de Fengtai et de Huaiyuan. » La plupart des gens partagent aujourd’hui cette affirmation. Selon les recherches universitaires, le huagudeng pourrait être l’héritier des arts populaires de la dynastie Song comme le sanbanggu (percussions et jonglage à trois baguettes), le yagu (littéralement « tambour surprise »), le shehuo (fête populaire), le yangge (« chants des repiqueurs de riz ») ou le dayehu.
La rivière Huai coule à l’est de la Chine, entre les bassins du Yangtsé et du fleuve Jaune. Grâce à sa situation géographique, elle joue un rôle unique dans la diffusion artistique des cultures du nord et du sud de la Chine, constituant progressivement des caractéristiques culturelles régionales propres. Les habitants de la vallée de la Huai font ainsi fusionner le nord et le sud en matière de traditions culturelles, d’us et coutumes, de modes de vie et de méthodes de production. Dans cette région unique de la province de l’Anhui, le huagudeng fait aussi la part belle au raffinement artistique et à la création inspirés aux habitants du cours moyen de la rivière Huai par leur vie de labeur. Cet art a d’ailleurs été salué par le premier ministre Zhou Enlai comme étant le « ballet de l’Orient ».
Le ballet est né dans les cours occidentales tandis que le huagudeng est issu du folklore populaire chinois. Quelles sont donc leurs caractéristiques artistiques propres ? Qu’ont-ils en commun ?
Prenons l’exemple du passage des « Quatre petits cygnes » du ballet Le Lac des cygnes de Tchaïkovski. Les quatre cygnes se dressent, se lèvent, tournent et sautent. La rotation de leur tête est coordonnée, pour mieux représenter l’innocence, la vivacité et le charme des cygneaux qui jouent dans le lac. Les qualités artistiques et visuelles sont très fortes.
Le huagudeng de l’Anhui associe les styles du chant Wu et de la danse Chu. La plupart des mouvements de cette danse sont inspirés de la vie professionnelle et l’ensemble reflète la vie ordinaire de la jeunesse rurale. Il mêle l’ingéniosité et la beauté de la Chine du sud à la force et à la simplicité de la Chine du nord. Ses caractéristiques artistiques s’expriment principalement dans des aspects globaux, régionaux et techniques.
Le huagudeng est un art folklorique complet qui intègre le chant, la danse et le théâtre. Il narre les joies et les peines des gens ordinaires à travers des mouvements de danse, des chants folkloriques et des saynètes. En plus de la danse, la performance des gongs et des tambours, les chants humoristiques des lanternes et les petites scènes de théâtre reflètent la vie du peuple.
Par ailleurs, la danse du huagudeng est passionnée, fougueuse, dépouillée et vivante. Les chants sont simples et intéressants, constitués de chansons d’amour, de poèmes narratifs et de farces, le tout teinté d’une forte saveur locale, qui montre pleinement les caractéristiques de la culture agricole de la vallée de la Huai.
Sur un plan purement artistique, la danse du huagudeng de l’Anhui est influencée par l’opéra chinois et le wushu et intègre de nombreuses techniques. Par exemple, les artistes masculins (qui supportent les tambours) exécutent souvent des sauts de seuils, des balayages en cercle, des roulades avant de bondir sur le tigre, des révérences et des flips. Ils exécutent également des mouvements populaires comme lorsqu’ils bondissent, marchent ou se retournent accroupis, donnent des coups de pieds en l’air, coupent des poireaux, rempotent des fleurs... Les artistes deviennent des observateurs de la vie. En outre, certains mouvements techniques nécessitent la coopération des artistes masculins (porteurs de tambours) et des artistes féminines (les orchidées), comme les portés sur les épaules, assis et debout, les jetés ou les pirouettes. Tout cela confère au huagudeng de l’Anhui encore plus de charme artistique.
Du point de vue de l’art, le ballet et le huagudeng partagent une quête esthétique commune. Ils sont tous deux les symboles de leurs cultures respectives et représentent des caractéristiques nationales. L’art peut être accepté et apprécié dans le monde entier, par des gens d’origines différentes. Il est diversifié et est tel un pont qui relie les mondes, au service des gens, sans distinction de nationalité ou d’âge. L’exportation de la culture et de l’art ainsi que les échanges artistiques se renforcent constamment, dans la continuité de la tendance de développement de la culture de la danse chinoise et occidentale.
Quelle a été l’influence du huagudeng à l’étranger ces dernières années ?
En 1982, Feng Guopei, artiste chevronné de l’École Feng de huagudeng de l’Anhui, a été le premier artiste de danse folklorique à participer au Symposium sur la danse asiatique qui s’est tenu à Pékin, sur l’invitation du président de l’Association de danse de Chine, Wu Xiaobang.
C’était il y a déjà 40 ans. Depuis, les universités, les institutions de recherche scientifique, les troupes professionnelles et les artistes folkloriques s’efforcent de transmettre et de protéger le huagudeng. Les œuvres qu’ils ont créées ont fait sensation lors de concours et de spectacles de danse en Chine et à l’étranger.
Ces dernières années, le huagudeng de l’Anhui a voyagé en France, aux États-Unis, en Russie, en Serbie, en Grèce... Il a reçu un excellent accueil et a été salué par la critique, ce qui démontre pleinement le charme unique de cet art.
Article traduit du chinois, initialement publié sur Chinanews.com.cn.
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