Constituant le seul groupe ethnique maritime en Chine, les Jing vivent principalement sur les trois îles de Shuwanwei, Shanxin et Wutou dans la province du Guangxi. Le peuple Jing est attaché au duxianqin, une forme ancienne de cithare célèbre pour sa corde unique qui « peut jouer des centaines de sons ». L'art Jing du duxianqin est entré dans le Golden Hall de Vienne en Autriche en tant que projet national du patrimoine culturel immatériel. Il s’y est ancré puis s'est répandu à l'étranger par le biais des centres de communication duxianqin établis dans de nombreux pays du monde entier.

Quelle est l’origine de l’art du duxianqin de l’ethnie Jing et quelle mémoire culturelle porte-t-il ? Comment peut-il sortir de la situation difficile d'être sur le point de se perdre et devenir un lien et un vecteur pour promouvoir l'identité nationale et les échanges culturels entre la Chine et les pays étrangers ? China News a récemment mené un entretien exclusif avec Zhao Xia, représentante de la région autonome, héritière de l'art du duxianqin des Jing et directrice du musée Dongxing des Jing.

L'art du duxianqin est un symbole important de la culture Jing. Quelle est son origine et l’histoire de développement ?

Dans le dialecte de Pékin, le duxianqin est appelé « danpao », mais il est également connu sous le nom de yixianqin et de duxianqin. Un instrument de musique à vent en bambou épais existait à l’époque de la Chine ancienne. Les écorces de bambou étaient ramassées sous forme de cordes qui étaient frappées ou pincées, ce qui a conduit à un développement continu des instruments à cordes. Le Nouveau Livre de la Dynastie Tang rapporte que « Le qin à une seule corde est fait de bambou tacheté sans aucune décoration. Il est sculpté de la tête d'un serpent venimeux nommé hui. Il n’y avait pas d’accordeur et l’unique corde était attachée au sommet de l’instrument ».

Le duxian paoqin faisait partie autrefois des instruments de musique populaires dans les anciennes cours chinoises. Sous la dynastie Tang, le duxianqin avait une seule corde, pas de frettes et produisait plusieurs sons. Apprendre à en jouer était difficile, mais tout aussi facile à oublier. Le son était si faible qu’il était désagréable à écouter, et de ce fait il y avait de moins en moins de professeurs et d’autant moins de pratiquants. Cet instrument fut progressivement abandonné par l'orchestre de la cour mais resta présent au sein du peuple. En raison de la faiblesse du son, il fut progressivement exclu des troupes littéraires et théâtrales et arriva finalement sur les terres côtières sauvages du sud, à des milliers de kilomètres de là. Et ce sont les ancêtres du clan Jing actuel qui ont donné au duxianqin la valeur d’un héritage artistique du clan.

La méthode traditionnelle de transmission de l’art du duxianqin se fait oralement et sans partition musicale unifiée. Ses propres limites rendent cet instrument mystérieux et sur le point de se perdre. Dans les années 1950, Su Shanhui, un musicien folklorique de l'ethnie Jing qui fut le premier à se produire au mémorial Sun Yat-sen dans la province du Guangdong, suscita l’attention en jouant la chanson ancienne Hautes montagnes et eaux vives sur un duxianqin. Depuis lors, de plus en plus d'artistes folkloriques s’impliquent dans l'amélioration et la diffusion du duxianqin. L’instrument de musique au style national unique et aux riches couleurs du sud est progressivement devenu connu dans le monde. En 2007, le duxianqin a été inscrit dans le premier lot de la liste du patrimoine culturel immatériel au niveau de la région autonome Zhuang du Guangxi, et en 2011, il a été inscrit sur la liste du patrimoine culturel immatériel au niveau national.

Quelles mesures ont été prises pour sauvegarder l’héritage de l’art du duxianqin de l’ethnie Jing ? Comment poursuivre ces travaux de transmission et de diffusion ?

Ces dernières années, la protection et l’héritage de l’art du duxianqin ont obtenu des résultats positifs. Depuis 2007 à aujourd'hui, un recensement des ressources artistiques du duxianqin a été réalisé, le musée Dongxing de l’ethnie Jing et l’éco-musée Dongxing de l’ethnie Jing ont été construits. L'art du duxianqin a été inclus dans le champ d'exposition du musée et de protection du patrimoine. Dans le même temps, et dans un souci de bien-être public, des centres de formation à l'art du duxianqin ont été créés dans les écoles primaires et secondaires de la ville de Dongxing afin de mettre en pratique cette volonté de formation et transmission. Ainsi, aujourd'hui, de nombreux centres de formation à cet art musical sont établis au sein des écoles primaires et de la ville de Dongxing, permettant la promotion et la transmission de cet héritage culturel tant en zone urbaine qu’en zone rurale. 

En 2023, un système d'héritiers représentatifs de l'art du duxianqin de l'ethnie Jing a été établi pour la première fois, avec un total de plus de 40 héritiers représentatifs. Chaque année, le service des finances de la ville de Dongxing investit un montant notable de fonds pour la compilation, la préservation et la protection de cet art. Le matériel artistique duxianqin du groupe ethnique Jing, ainsi que le soutien aux héritiers représentatifs, mènent des activités d'apprentissage et organisent chaque année régulièrement une formation publique qui rassemble en moyenne environ 300 étudiants sur l’année. Des concerts, des concours et d’autres activités sont également organisés. Et ainsi, après des années de travail acharné, l’art du duxianqin de l’ethnie Jing a échappé à la situation difficile d’être sur le point de disparaître.

Après une longue période de développement, quels traits distinctifs et quels styles l’art du duxianqin de l’ethnie Jing a-t-il développé ?

Le duxianqin a une forme ancienne et une structure relativement simple. Il est composé d'un corps de piano (une caisse de résonance), d'une cheville, d'une bascule, d'une corde et d'autres composants. On distingue deux types d’instruments en fonction des matériaux utilisés, c’est-à-dire le bambou et le bois.

Les formes couramment utilisées dans les performances comprennent le duxianqin folklorique en bambou, le duxianqin en bois et divers duxianqin améliorés. Il existe aujourd’hui le duxianqin amplifié électrique pour lequel un micro et un haut-parleur sont installés dans la caisse de résonance. Le son est considérablement augmenté, il est plus doux et plus beau, et plus adapté au jeu en solo. Le duxianqin est un instrument harmonique qui peut jouer à la fois les harmoniques et les tons fondamentaux sur une seule corde, ce qui lui permet d'exprimer de longues mélodies lyriques avec un attrait artistique unique.

Comment l’art du duxianqin des Jing peut-il s’exporter et devenir un pont pour les échanges culturels et artistiques entre la Chine et les pays étrangers ?

Les améliorations et les innovations de duxianqin constituent un vecteur d'échanges culturels et artistiques entre la Chine et les pays étrangers. Grâce à la persistance de l'exploration, de la recherche, de l'amélioration et de l'innovation par des générations de joueurs de duxianqin, trois types d’instruments ont été développés : le duxianqin de Jing multifonctionnel, le duxianqin à tête de dragon et le duxianqin à amplification électroacoustique intégré au corps. Les grandes améliorations apportées, qui ont sublimé la qualité du son et augmenté son volume, ont promu l'art du duxianqin sur les scènes chinoises et étrangères.

La veille du Nouvel An 2002, la soliste de l'Ensemble central de chants et de danses ethniques et membre du Groupe des douze femmes Lei Ying a joué au duxianqin la pièce La corde sensible au Golden Hall de Vienne. Cette interprétation a reçu les éloges de la communauté internationale et musicale. En 2004, ce même ensemble a permis au duxianqin de rencontrer les peuples de l’Asie du Sud-Est lors du Southeast Asia Tour Concert. Plus tard en 2009, l'héritier Su Haizhen a participé au Concours international d'art Delphi en Corée du Sud à l’occasion duquel il a interprété Mère patrie, Luth et Cithare dans un solo de duxianqin, dévoilant ainsi le charme de cet instrument de l’ethnie Jing. Certains passionnés jouent également un rôle important dans la promotion de la propagation du duxianqin. C’est le cas par exemple de Zhou Ziying, un Chinois vivant aux États-Unis, qui a créé des centres d'instruction respectivement aux États-Unis et à Singapour, élargissant ainsi l'influence du duxianqin à l'étranger.

Article traduit du chinois, initialement publié sur Chinanews.com.cn.