
Entretien avec Jin Cheng : les clés du succès de l'anime chinois
Fort d'une esthétique singulière, l'anime chinois s'est imposé sur la scène internationale il y a plus d'un demi-siècle, donnant naissance à un courant artistique unique, reconnu sous le nom de « l'école chinoise ». Après avoir connu un certain déclin face à la concurrence américaine et japonaise, il connaît depuis une dizaine d'années un renouveau sans précédent, grâce à un soutien politique accru et à l'émergence de nouveaux talents. Comment l'anime chinoise a-t-il évolué au fil des décennies ? Où en est-il aujourd'hui ? Entretien avec Jin Cheng, président de l'Association des créateurs d'animation de la province du Guangdong.
Comment la bande dessinée chinoise a-t-elle évolué au fil des années et quelles en sont les principales caractéristiques ?
Profondément ancrée dans l'évolution des médias, la bande dessinée chinoise s'est toujours distinguée par son lien étroit avec le quotidien des citoyens et son souci d'explorer de nouvelles formes artistiques tout en reflétant les réalités sociales. Les premières traces de la bande dessinée moderne en Chine remontent à 1899, avec la publication de L'Illustration de la situation politique actuelle par Xie Zantai, qui dénonçait les ambitions impérialistes occidentales. Les années 1920 et 1930 marquent un âge d'or pour la bande dessinée chinoise, avec l'émergence de publications satiriques comme Shanghai Puck et Shidai Manhua. Le studio de cinéma des beaux-arts de Shanghai, quant à lui, a contribué à forger l'identité de l'animation chinoise à travers des classiques intemporels comme Les Têtards à la recherche de leur maman et Impression de montagne et d'eau.
Avec les réformes économiques dans les années 1980, le lianhuanhua (traduit en français par « images enchaînées »), proche de la bande dessinée, a connu un regain de popularité. Ce format d'albums illustrés, souvent comparé à des « films sur papier », a permis à de nombreux lecteurs de découvrir des œuvres de la littérature étrangère. Les années 2000 ont vu fleurir de nombreux magazines spécialisés comme Manyou et L'univers de Manhua, suscitant un engouement sans précédent chez les jeunes lecteurs.
Quels liens unissent les dessins animés et les bandes dessinées ? Comment expliquer l'émergence de l'animation chinoise ces dernières années ?
Dans des pays comme les États-Unis et le Japon, où l'industrie de l'animation est florissante, près de 80 % des productions animées, ainsi qu'une grande partie des jeux vidéo et des films, sont adaptés de bandes dessinées. Le succès commercial d'une BD constitue souvent un tremplin pour des adaptations en séries animées, ouvrant ainsi la voie à une exploitation plus large sur le marché. Les bandes dessinées et les dessins animés entretiennent ainsi une relation symbiotique, se nourrissant mutuellement et s'enrichissant réciproquement.
En Chine, cette dynamique est également à l'œuvre. De nombreux dessins animés sont directement inspirés de bandes dessinées, témoignant d'un lien étroit entre ces deux formes d'expression artistique. Le succès international d'œuvres comme Les Grands savants chinois illustre la richesse culturelle et l'originalité de la bande dessinée chinoise. Parallèlement, le développement de l'animation en Chine est activement soutenu par le gouvernement. Depuis 2006, une série de mesures ont été mises en place pour promouvoir cette industrie, notamment la création d'un fonds spécifique. De plus, le pays dispose d'un vivier exceptionnel de jeunes talents, porteurs de visions innovantes pour l'avenir de l'animation. Ce soutien, couplé à un riche patrimoine culturel, explique l'essor fulgurant de l'animation chinoise ces dernières années.
Quels sont les enjeux des échanges entre les productions animées chinoises et internationales ?
La Chine, désormais un acteur incontournable sur la scène mondiale de l’animation, se distingue par des œuvres imprégnées de culture et d’humanisme chinois. Ces créations, riches en visuels spectaculaires et en intrigues aux nombreux rebondissements, séduisent un public local et international toujours plus large. L'animation, comme la bande dessinée, grâce à leur langage universel, jouent un rôle essentiel dans le rapprochement des cultures. En touchant un public large et diversifié, elles favorisent le dialogue interculturel et mettent en lumière des valeurs communes.
En juin dernier, la Semaine de la BD et de l’animation sino-belge s’est tenue en Belgique. Des œuvres chinoises telles que Biao Ren, Lames des Gardiens ou When History Meows y ont été présentées et ont reçu un accueil enthousiaste de la part des visiteurs. Des professionnels de la bande dessinée, des curateurs et des directeurs de musées belges ont profité de cet événement pour partager leurs réflexions sur l’histoire des échanges culturels entre la Chine et la Belgique.
Article traduit du chinois, initialement publié sur Chinanews.com.cn.
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