« Le Classique du thé » ou la sagesse orientale dans une tasse

1738668557430 China News Xu Jing

Lu Yu, le « Sage du thé » de la dynastie Tang, a écrit Le Classique du thé. Il s’agit de la première monographie du thé au monde, qui est considérée comme la plus ancienne, la plus complète et la plus complète qui existe en Chine et ailleurs. Cependant, pour les lecteurs non sinophones, il est difficile d’explorer et de comprendre ce classique de la science du thé.

À l'occasion du 1291e anniversaire de la naissance de Lu Yu, la première traduction du Classique de Thé rédigé en chinois classique, en langue vernaculaire et anglais a été réalisée à Shanghai. Pourquoi cet ouvrage demeure-t-il encore aujourd’hui un classique de la culture du thé dans le monde ? Quelle importance cette traduction très précise du Classique de Thé a-t-elle, pour qu’un plus grand nombre de personnes comprennent et apprécient la culture chinoise du thé ? À la fois traducteur du Classique de Thé et doyen de l'École d'éducation ouverte de l'Université de commerce international et d'économie de Shanghai, Qiu Guixi a récemment accepté un entretien exclusif avec China News.

Comment est née votre relation et votre attachement au Classique du thé et comment avez-vous eu l’idée de le traduire en anglais ?

En novembre 2022, les « techniques traditionnelles chinoises de fabrication du thé et les coutumes associées » ont été officiellement inscrites sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l'humanité de l'UNESCO, ce qui constitue une grande fierté pour l'industrie chinoise du thé.

Je suis originaire de la province du Jiangxi. Depuis ma plus tendre enfance, j’ai grandi en buvant du thé dans un grand bol et j'ai gardé une affection toute particulière pour le thé. Plus tard, j'ai été doyen de l'École des échanges internationaux de l'Université de commerce international et d'économie de Shanghai pendant près de 10 ans, j'ai visité ainsi près de 60 pays et régions. À l’occasion des échanges avec l’étranger, le thé est naturellement un moyen de communication important, mais j'ai découvert que les amis étrangers buvaient davantage le thé du Sri Lanka ou d'autres pays. Peu buvaient du thé chinois et très peu connaissaient le Classique du thé. C’est ainsi que m’est venue l’idée de sa traduction.

À mon avis, le Classique du thé n'est pas seulement une fenêtre ouverte sur l’étude et la compréhension de la culture traditionnelle chinoise. Il délivre la précieuse clé qui permet de savourer la sagesse orientale et d'expérimenter son art de vivre.

En 2020, j'ai sélectionné comme textes de base un original du Classique du thé contenu dans Cent fleuves pour un océan, qui date de la période Xianchun (1265-1264) pendant la dynastie des Song du Sud, et plusieurs références d’éditions à partir de la dynastie Ming qui se trouvent au sein de la collection de la Bibliothèque nationale de Chine. Pour la version vernaculaire, j'ai utilisé la traduction du chercheur Shen Dongmei de l'Académie chinoise des sciences sociales.  Il a fallu près de quatre années pour achever cette traduction afin que les amis étrangers puissent comprendre le thé chinois et la culture du thé avec précision. J’espère également que cette traduction pourra jeter un pont entre l'Orient et l'Occident, en favorisant l'intégration culturelle et la communication entre les peuples.

Quelles sont les difficultés à traduire le Classique du thé en anglais ?

Le Classique du thé est divisé en trois volumes avec un total de dix chapitres. Non seulement le texte est concis et beau, mais le contenu est riche et varié. La première difficulté pour les traducteurs réside dans le fait qu'ils ne sont pas familiarisés avec la plupart des connaissances impliquées. C’est le cas par exemple pour le Livre des Mutations, le domaine de la botanique, etc. À l'heure actuelle, la seule option est de consulter des professionnels pour « prendre des cours complémentaires » et acquérir des connaissances pertinentes. Ce n'est que lorsque chaque mot du Classique du thé a été compris qu’il est possible de prendre la plume pour le traduire en anglais.

Certaines personnes à l'étranger ont également traduit le Classique du thé, cependant, il ne s'agit pas de traductions complètes, mais seulement d’un résumé de la traduction. C’est le cas de All About Tea (The Complete Book of Tea) de l'Américain William Ukers et publié en 1935, qui est constitué par la traduction de certains chapitres et d’une introduction au Classique du thé. Le livre commence ainsi : « Le Classique du thé est le premier livre entièrement sur le thé écrit par l'érudit chinois Lu Yu. Les agriculteurs chinois de l'époque et ceux du monde entier en ont tous bénéficié. » 

En fait, une grande partie du contenu du Livre complet du thé est directement issue du Classique du thé et le présente de manière exhaustive.  Cependant, on peut également voir dans la section 4 relative aux ustensiles que l’entrée « Brasero » du Classique du thé est traduite par la seule phrase « Un brasero est fait de laiton, de fer ou de boue en forme d'ancien trépied. »

En raison de la différence entre les cultures chinoise et étrangères, la culture chinoise fait une distinction entre « bouillon » et « soupe », mais pas la culture anglaise. Parfois, un mot en chinois, dans le texte du Classique du thé comme chi 池, signifie en anglais à la fois « étang » et « piscine ». L’utilisation de l’un ou de l’autre n’est finalement qu’une question d’opinion.

Voici un autre exemple. Le Classique du thé contient de nombreux noms d'unités de mesure en usage pendant la dynastie Tang qui ne peuvent pas être directement converties en unités de mesure internationales lors de la traduction. Dans le cas contraire, cela constituerait une omission majeure par rapport aux unités de mesure chinoises traditionnelles. Ce sont là des considérations importantes pour le traducteur, qui augmentent encore plus la difficulté de son travail.

Tout en étant précis, la traduction abandonne les annotations traditionnelles telles que les notes de bas de page et les remplace par des remarques parenthétiques dans le texte, dans l'espoir de faciliter la lecture pour les personnes dont le chinois n'est pas la langue maternelle.

Quelle est la particularité du Classique du thé dans l’histoire des échanges de thé entre la Chine et les pays étrangers ?


La Chine est le premier pays au monde à avoir planté du thé à grande échelle et à avoir créé une manière de le boire. La dynastie Tang a été l'apogée du développement économique, politique et culturel de la Chine ancienne. La culture du thé et son système global se sont formés, et le Classique du thé est né au cours de cette période.

Le Classique du thé est non seulement un trésor de la civilisation chinoise, mais c’est également un classique de la culture du thé dans le monde. Cette « encyclopédie » de la science du thé avec seulement 9 042 caractères dans le texte original est très riche en contenu, couvrant la botanique, l'histoire, la littérature, la pharmacologie et d'autres sujets, jetant les bases de la formation de la « science du thé » et de la « cérémonie du thé » chinoises.

Le Classique du thé original s'est d'abord répandu dans les cercles culturels Han tels que la péninsule coréenne, le Japon et le Vietnam, puis des versions réécrites et traduites dans les langues locales ont commencé à apparaître. Après avoir été diffusé en Europe, et ceci relativement tardivement, le Classique du thé a été successivement traduit en anglais, allemand, français, italien et dans d’autres langues espagnoles. L'Italie est l'un des premiers pays européens à avoir étudié le thé chinois. Selon des recherches menées par des chercheurs concernés, la traduction italienne du Classique du thé publiée par le sinologue italien contemporain Marco Ceresa en 1991 demeure à ce jour la traduction la plus complète du Classique du thé en Occident.

À différentes étapes historiques, les objectifs des érudits chinois et étrangers dans la traduction et l'introduction du Classique du thé sont également différents. D'une manière générale, ils sont passés de la simple transmission d'informations matérielles liées aux ustensiles de thé, aux feuilles de thé et à la préparation du thé, à la diffusion de cette exceptionnelle culture traditionnelle chinoise.

Article traduit du chinois, initialement publié sur Chinanews.com.cn.


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