
Sports traditionnels ethniques chinois : un héritage ancestral en pleine renaissance
Le 22 novembre 2024, les 12e Jeux nationaux des sports traditionnels ethniques se sont ouverts à Sanya, dans la province insulaire de Hainan, au sud de la Chine. Cette édition comprenait dix-huit épreuves de compétition et trois grandes d’épreuves de performance, dont le tir à l’arbalète à cent pas, la traversée de la rivière sur une canne de bambou unique, ainsi que le huapao, sorte de rugby d’Orient.
En Chine, ces « spécialités » étaient à l’origine réservées à un groupe ethnique ou à une région donnés, mais elles sont désormais des sports qui jouissent d’une nouvelle vigueur et qui sont appréciés par de nombreux groupes ethniques.
Comment les sports traditionnels des minorités ethniques chinoises ont-ils perduré et sont-ils devenus si populaires au fil du temps ? Zhuang Changkuan, vice-président de l’École d’éducation physique de l’Université normale de Hainan, a récemment accordé une interview exclusive à China News pour nous apporter son éclairage.
À quand remontent les sports traditionnels ethniques de Chine ? Quelle est leur histoire ? Comment ont-ils été transmis, génération après génération ?
Les sports traditionnels ethniques trouvent principalement leur origine dans les activités productives et militaires. Dans le cadre de la pêche, de la chasse, de l’agriculture et des rites, les minorités ethniques ont progressivement développé des sports aux caractéristiques nationales, souvent étroitement liés à leurs capacités de survie, à leurs croyances religieuses ou à leurs besoins en matière de divertissement.
Au cours de la période pré-Qin, certaines activités sportives des minorités ethniques existaient déjà, comme la balançoire ou l’escalade d’arbres. La plupart étaient fortement apparentées au travail productif. Les Chinois de l’époque ont également créé une série de mouvements de « danse » pour exercer leurs muscles et leurs os. Sous les dynasties Qin et Han, l’intégration des groupes ethniques a permis de promouvoir les échanges sportifs et culturels. Certaines minorités ethniques ont ainsi joué au cuju (ancien jeu de balle) et pratiqué le jiaodi (lutte), largement répandus et très appréciés par les populations de l’époque. Des Trois royaumes aux dynasties Sui et Tang, les affrontements militaires ont incité les dirigeants à renforcer leurs troupes et à promouvoir le développement des arts martiaux auprès des minorités ethniques, comme l’équitation ou le tir à l’arc. Au cours des dynasties Song, Yuan, Ming et Qing, le système des arts martiaux a progressivement pris forme et les sports traditionnels ethniques ont continué à se développer en abondance avec des caractéristiques nationales distinctes.
À travers les migrations tribales, les échanges commerciaux et les guerres, les minorités ethniques de Chine ont encouragé la transmission et les partages d’activités sportives. Les sports traditionnels ethniques ont été transmis de génération en génération grâce, notamment, à la transmission orale, aux activités folkloriques, aux cérémonies religieuses et aux compétitions sportives.
Dans les familles et les tribus des minorités ethniques, les sports traditionnels sont principalement transmis par voie orale, des aînés aux jeunes générations. Par exemple, les aînés mongols parlent des rituels et des traditions des compétitions de lutte lors des pâturages quotidiens et enseignent les techniques et les règles de ce sport aux plus jeunes. Ce mode de transmission assure la pérennité des sports traditionnels ethniques.
Les festivités folkloriques et les célébrations organisées au sein des communautés participent également grandement à la transmission des sports traditionnels. Prenez l’exemple du Naadam. Cette fête mongole était déjà largement célébrée dans les steppes mongoles pendant la dynastie Yuan et est progressivement devenue un divertissement organisé régulièrement par les fonctionnaires sous la dynastie Qing. Elle est toujours célébrée aujourd’hui.
Pourquoi dit-on que les sports traditionnels ethniques sont des « fossiles vivants » qui témoignent des gènes multiethniques de la culture chinoise ?
Du point de vue de leur origine, la plupart des sports traditionnels ethniques sont issus de la vie productive, des activités militaires, des rites religieux et d’autres scènes qui rythment le quotidien des divers groupes ethniques. Par exemple, les courses de chevaux mongoles résultent de la vie nomade. Elles permettaient aux bergers de sélectionner de bons chevaux et de montrer leurs talents de cavaliers. Le jeu de la balle-perle mandchou faisait initialement référence au travail effectué par les ancêtres mandchous qui collectaient des perles dans les rivières. Ces sports sont porteurs de la mémoire des modes de production utilisés dans chaque groupe ethnique à une période donnée. De ce fait, ils constituent les racines de la culture ethnique.
En termes d’héritage, les sports traditionnels ethniques se transmettent de génération en génération, par voie orale, dans le cercle familial, lors de célébrations et de fêtes. Ils garantissent ainsi la pérennité des gènes culturels ethniques. Leurs règles et leurs rituels préservent les valeurs et les aspirations spirituelles des groupes ethniques. Les sports traditionnels ethniques sont également des témoins de l’intégration ethnique. Par exemple, la lutte est pratiquée par de nombreux groupes ethniques, tels que les Mongols et les Mandchous, chacune avec ses propres caractéristiques.
Du point de vue de la connotation culturelle, ces sports véhiculent un esprit national et des symboles culturels d’une grande richesse. Ils témoignent de la spiritualité, des coutumes, des concepts esthétiques et de nombreux autres éléments culturels de divers groupes ethniques, mais aussi des gènes multiethniques de la culture chinoise. Par exemple, dans les spectacles équestres tibétains, les costumes, les mouvements et les rituels de compétition des cavaliers revêtent tous une portée culturelle.
Chaque sport possède ses spécificités et reflète également des caractéristiques ethniques propres. Par exemple, le huapao, sorte de rugby d’Orient, est populaire dans le Guangxi, le Guizhou, le Yunnan et le Hunan, entre autres provinces. Il s’agit d’un sport traditionnel pratiqué par l’ethnie Dong. Le jeu de la balle-perle est originaire du nord du mont Changbai, des cours moyen et supérieur du Heilongjiang et du bassin de l’Oussouri. Les règles du jeu et les accessoires et équipements utilisés rappellent les caractéristiques de la culture de la pêche et de la chasse du peuple mandchou. L’escalade de cocotier est populaire à Hainan et dans certaines régions du Guangdong, du Guangxi et du Yunnan, s’inspirant principalement des populations locales qui grimpent aux arbres pour cueillir des noix de coco.
Pourquoi les sports traditionnels ethniques de Chine ont-ils perduré dans le temps et gagné en vigueur ?
Les sports traditionnels ethniques sont porteurs de l’histoire, de la culture, des croyances et des valeurs de chaque groupe ethnique. Transmis de génération en génération, ils renforcent le sentiment d’identité et de cohésion nationales.
Avec le renforcement de la puissance nationale de la Chine, l’État et la population accordent une attention croissante aux sports traditionnels, ainsi qu’à la découverte et à la promotion de la culture traditionnelle. C’est pour cette raison que la culture des sports traditionnels s’est considérablement développée en Chine.
Le gouvernement chinois attache une grande importance aux sports traditionnels ethniques et les a intégrés dans les plans nationaux de développement économique et social. Il a formulé des politiques et des réglementations pertinentes, fourni des garanties de financement et organisé des compétitions à grande échelle. Ce faisant, il a encouragé l’étude, la collecte, la promotion et la popularisation des sports traditionnels, favorisé leur développement et encouragé les écoles à dispenser un enseignement et à mettre en place des activités relatives aux sports traditionnels ethniques. Il a ainsi constitué une base de talents pour leur développement à long terme.
Les sports traditionnels ethniques peuvent répondre aux recommandations pour préserver une forme physique, mais aussi satisfaire les besoins en termes de loisirs et de détente. Puisqu’ils ont su s’adapter aux gens d’aujourd’hui et à leur quête d’un mode de vie sain, ils se sont assurés une vitalité durable.
Les sportifs ethniques ont également contribué au développement des sports traditionnels, d’une part en innovant dans les règles et les formes de leur discipline. Ils ont par exemple intégré des musiques modernes, des éclairages ou d’autres éléments à même de développer de nouveaux modes de compétition ; d’autre part, en fusionnant avec les industries du sport, de la culture et du tourisme modernes, ils ont su créer des marques de sports traditionnels ethniques, élargissant ainsi leur espace de développement et leur donnant une nouvelle vigueur.
La Chine attache aujourd’hui une grande importance à l’héritage et au développement de la culture traditionnelle. Elle a introduit une série de politiques visant à soutenir les sports traditionnels ethniques, en fournissant une garantie politique solide et une plateforme de soutien pour leur développement.
En tant que vecteur important de la culture nationale, les sports traditionnels ethniques sont appréciés par tous, ce qui crée un climat social favorable à leur développement. Parallèlement, l’intégration et le développement de la culture, du tourisme, du sport et d’autres industries offrent également de nouvelles opportunités de développement.
Enfin, la mondialisation favorise les échanges culturels internationaux. En tant qu’élément majeur de la culture chinoise, les sports traditionnels ethniques ont davantage de possibilités d’échanges et de coopération avec les cultures sportives d’autres pays et groupes ethniques et peuvent ainsi apprendre de leurs expériences et de leur développement avancé.
Article traduit du chinois, initialement publié sur Chinanews.com.cn.
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