En seulement 12 épisodes, le nouveau thriller produit par Tencent Video explore, avec une précision clinique et une délicatesse rare, les strates familiales et sociales d’une petite ville quasi fantomatique, perdue dans le nord-ouest de la Chine. Un polar chinois de haute voltige, transcendé par une beauté contemplative, brute et intense.

Si vous avez aimé Black Dog de Guan Hu, sorti en France fin février, vous devriez apprécier la mini-série chinoise Sandstorm, qui nous plonge dans la même atmosphère envoûtante du désert du nord-ouest de la Chine. D’autant plus que les deux œuvres se déroulent à la même époque, aux alentours des années 2000, et placent au cœur de leur récit les gueules cassées, les marginalisés, les laissés-pour-compte… bref, les oubliés du boom économique chinois. Mais en insufflant à ses personnages un profond fatalisme, la nouvelle série du réalisateur Tan Jiayan captive par une intrigue encore plus sombre et troublante.

En 2004, dans le comté de Kulu, la découverte d’un corps calciné dans la chaufferie de la centrale thermique fait l’effet d’une bombe. Dans ce coin reculé, loin du tumulte urbain, le calme apparent vole en éclats. Très vite, trois suspects sont identifiés. Parmi eux, Ding Baoyuan, directeur de la centrale, tente de fuir avant d’être arrêté. En garde à vue, il avoue être l’auteur du crime. Affaire classée, justice rendue… Du moins, c’est ce que tout le monde croit.

Mais un an plus tard, Ding se rétracte. Pendant sept longues années, il clame inlassablement son innocence. Son obstination finit par attirer l’attention des autorités provinciales, qui envoient sur place l’enquêtrice criminelle Luo Jingwei, bien décidée à faire éclater la vérité. À ses côtés, Chen Jianghe, l’un des deux policiers ayant traité l’affaire. En rouvrant le dossier, ils exhument bien plus qu’un simple fait divers : un passé enfoui, des silences oppressants, et une vérité bien plus sombre que prévu… Au même moment, une autre tempête s’abat sur cette petite ville.

Construite sur un récit à double temporalité, Sandstorm enchaîne les flashbacks, remontant peu à peu le fil de cette histoire macabre, jusqu’à ce que le passé finisse par rattraper le présent, au sens propre comme au figuré. Les tempêtes de sable, omniprésentes dans le paysage, façonnent autant le décor que les personnalités singulières de ses habitants. Tout gravite autour d’un monde vidé de sa substance, où l’on tente malgré tout de survivre. Comme le décrit avec justesse le roman Sandstorm - que Ding Baoyuan lit inlassablement en prison - : « Le charbon de la région est épuisé. Seuls persistent quelques femmes, des enfants et des vieillards, incapables de fuir. Pris au piège des tempêtes de sable, ils s’accrochent désespérément à ce qui subsiste. » Une mise en abyme habile, à la fois moteur du suspense et véritable leitmotiv de l’intrigue.

Premier thriller de la scénariste multi-primée Zhao Dongling, encensée pour son écriture ciselée, ancrée dans le réalisme et le quotidien, Sandstorm déploie avant tout une galerie de personnages hauts en couleur : un étudiant arriviste, un père lâche, une épouse d’une énergie bouillonnante… Le tout sur fond d’une ancienne ville charbonnière en déliquescence. L’acteur Duan Yihong incarne, avec une précision remarquable, un policier à la fois désinvolte et chaleureux. À travers le duo qu’il forme avec la jeune enquêtrice Luo, le récit oscille entre passé et présent, offrant un regard croisé, sensible et nuancé, sur le crime et les liens inextricables qui unissent les habitants. En situant son intrigue dans le nord-ouest de la Chine, le réalisateur juxtapose l’immensité d’une nature aride à une société aux réseaux quasi hermétiques, faisant du désert la nouvelle terre promise du thriller chinois.

Sandstorm 沙尘暴

Genre : thriller

Diffusion : mars 2025

Plateforme de diffusion : Tencent

Nombre d'épisodes : 12

Réalisé par Tan Jiayan

Avec Duan Yihong, Wang Qiang, Zhang Jianing, Zhang Yao... 

Photos : Tencent