
Pont de Lugou : lions de pierre, impacts de balles et mémoire nationale
À Pékin, le pont de Lugou ne se contente pas d’enjamber la rivière Yongding. Il porte sur ses pierres les cicatrices d’une guerre qui a façonné l’histoire de la Chine : l’Incident du 7 juillet 1937, point de départ de la Guerre de Résistance contre le Japon.
Un pont historique devenu champ de bataille
Construit en 1189, le pont de Lugou s’impose depuis plus de 800 ans comme une prouesse architecturale. Marco Polo lui-même le qualifiait de « plus beau et plus singulier pont du monde ».
Mais dans la nuit du 7 juillet 1937, ce site paisible devient le théâtre d’un affrontement décisif. Les forces japonaises y déclenchent un incident militaire qui marque le début de l’invasion totale de la Chine. Les soldats chinois ripostent, tirant les premiers coups de feu d’une résistance nationale qui fera entrer le pont dans l’histoire comme symbole de lutte contre le fascisme.
La mémoire d’une famille
« Mon grand-père n’avait que six ans lorsque les tirs ont brisé le silence de la nuit. Le lendemain, un obus a explosé près de sa maison. Son camarade de jeu de la veille a été tué sur le coup », raconte Zheng Ran.
Son grand-père, Zheng Fulai, témoin direct de la bataille, a choisi en 1951 de devenir conteur bénévole. Pendant des décennies, il a partagé l’histoire du pont avec des visiteurs venus de plus de 70 pays, touchant des dizaines de milliers de personnes.
Le vétéran de guerre
Zheng Fulai racontant l'histoire de la guerre de résistance aux visiteurs sur
le pont de Lugou © CNS
Aujourd’hui, sa petite-fille poursuit la mission familiale. Sur le pont, elle commence souvent ses récits avec les célèbres lions de pierre avant de plonger les visiteurs dans l’histoire de courage et de résistance qui s’y rattache.
L’histoire au cœur de la vie moderne
À l’extrémité est du pont de 266 mètres s’élève la forteresse de Wanping, où les impacts de balles et les éclats d’obus témoignent encore du combat. Dans cette vieille ville, les musées côtoient désormais cafés et librairies, mêlant mémoire et vie quotidienne.
© CNS
Au nord du pont passait autrefois la voie ferrée Pinghan, théâtre d’intenses batailles. Aujourd’hui, c’est la ligne Pékin-Guangzhou à grande vitesse qui file non loin, symbole d’une Chine tournée vers l’avenir. Plus au sud, l’autoroute Pékin-Hong Kong-Macao voit défiler un flot continu de véhicules, tandis que le parc du lac Xiaoyue offre aux habitants des sentiers pour se promener ou courir, dans un cadre apaisé.
Le pont de Lugou, plus ancien pont en arc de pierre de Pékin, n’est pas qu’un vestige architectural. Il incarne le point de départ de la résistance nationale chinoise. Entre patrimoine culturel et symbole de bravoure, il rappelle que la paix fut chèrement acquise et que la mémoire collective reste essentielle pour la préserver.
Article traduit de l’anglais et initialement publié sur China Minutes.
Photo du haut : le pont de Lugou et la forteresse Wanping © CNS
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