Dans son roman « Portrait d'un voleur », Grace D. Li explore la recherche de l’identité sino-américaine sur fond de cambriolages dans les musées

1661250203437 China News Gao Chuyi

« Portrait d'un voleur » (« Portrait of a thief » en anglais), premier roman de Grace D. Li, étudiante en médecine à l'Université de Stanford, publié début avril, a été instantanément propulsé sur la liste des bestsellers du New York Times. Dans son livre, à travers son expérience, l'auteure explore la complexité de l'identité sino-américaine.

Classé parmi les « romans les plus attendus de 2022 » par Goodreads, un réseau américain de critiques de livres, et Bookbub, une plateforme de partage de livres électroniques, « Portrait d’un voleur » est une « lettre d'amour à l'expérience sino-américaine », selon un article du Stanford Daily. Netflix vient d’acquérir les droits du roman pour une adaptation télévisée sur laquelle Grace D. Li sera productrice exécutive.  

Dans son interview accordée à China News, Grace D. Li explique que la recherche d’identité des Sino-américains implique en grande partie la recherche d’un sentiment d’appartenance et d’un lieu qu’ils peuvent considérer comme leur « chez soi ». Elle espère notamment qu’il y ait de plus en plus de récits sur les Américains d’origine asiatique pour que les jeunes générations d’américains d’origine asiatique soient moins confrontées au « conflit » d’identité. 

Le postulat de votre roman est basé sur des faits réels : les disparitions de pièces chinoises des musées occidentaux. Comment ces histoires de disparitions vous-ont-elles inspirée ? Pourquoi écrire un tel roman sur les Américains d’origine asiatique ?

Quand j’étais enfant, je n'avais jamais lu de livres avec un personnage comme le mien, je ne savais donc pas qu’une fiction américaine pouvait aussi inclure des personnes d'origine asiatique. Ce n'est qu'une fois à l'université que les choses ont commencé à changer, où j'ai eu la chance de travailler avec d’autres écrivains asiatiques. Et lorsque j'ai entendu parler des vols d’œuvres d’art chinois, j'ai su qu’en tant que lectrice, je voudrais lire un livre sur ce sujet. En fait, je me suis demandée ce que l’histoire pourrait raconter si les voleurs n'étaient pas des cambrioleurs professionnels mais simplement des étudiants américains d’origine chinoise, et ce que ces cambriolages pouvaient raconter sur leur identité et sur leurs espoirs. Pour moi, l'idée que des sino-américains veuillent restituer des œuvres d'art pillées en Chine est particulièrement significative, car l'identité sino-américaine est intimement liée à la recherche d'un sentiment d'appartenance.

Votre roman raconte donc l’histoire d’une bande d’étudiants américains d’origine chinoise qui tentent de restituer des œuvres d’art chinoises qui ont été « pillées » en Chine. Sous votre plume, où en est la recherche d’identité de vos personnages ?

Dans mon roman, je voulais raconter des expériences particulières de certains Américains d’origine chinoise. En réalité, il n’y a pas une seule identité sino-américaine car chaque identité est influencée par l’environnement, l’éducation ou encore le statut socio-économique de chaque personne et de chaque famille. Dans mon livre, il y a notamment un personnage qui a grandi à Pékin avant d’arriver aux États-Unis, il est donc naturel qu’il se considère davantage comme Chinois qu’Américain. Et un autre personnage d’origine chinoise, a quant à lui, vécu toute sa vie aux États-Unis. Mes personnages vont de la première génération d’immigrés à la troisième génération, et leurs expériences dans la recherche d’identité sont étroitement liées à leur histoire. Néanmoins, ils trouvent de nombreux points communs lorsqu’il s’agit de cuisine chinoise ou de racisme.

De quelle manière l’environnement bi-culturel sino-américain dans lequel vous avez grandi vous a influencé ? Comment gérez-vous votre « conflit » identitaire ? Selon vous, comment les jeunes chinois issus de deux cultures peuvent-ils être en paix avec leur identité ?

J’ai grandi aux États-Unis mais on me demande souvent d’où je viens. Bien que je sois née et que j’ai grandi aux États-Unis, quand je réponds que “je suis Américaine”, cela ne semble pas une réponse assez satisfaisante ou évidente pour les autres américains qui me posent la question, jusqu’à ce que je leur dise que je suis « Chinoise ». Par ailleurs, quand je suis en Chine, il arrive à des inconnus ou même des proches de me demander si je parle chinois et si je sais utiliser les baguettes. Où que je sois, j’ai l’impression que je ne serais jamais assez Américaine ou assez Chinoise.

J’ai passé beaucoup d’années à résoudre ce « conflit », jusqu’à mon entrée à l’université, où j’ai commencé à me sentir à la fois Américaine et à la fois Chinoise. Je ne saurais dire à quel moment exactement s’est opéré ce changement, mais il est certain que les cours de chinois, la fréquentation d’autres Américains d’origine asiatique ainsi que la littérature asio-américaine m’ont aidé à m’adapter. J’espère que le développement de récits d’Américains d’origine asiatique va aller de pair avec la réduction de « conflits » identitaires chez ces Américains, pour que les jeunes générations puissent être davantage en paix avec leur identité. 

Grace D. Li a grandi à Pearland, au Texas, et est diplômée de l'Université Duke, où elle a étudié la biologie et l'écriture créative. Elle fréquente actuellement la faculté de médecine de l'Université de Stanford.

Cet article a été initialement publié en chinois sur Chinanews.com.cn.

Photos : compte Twitter de Grace D. Li.

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