Un an après son adoption par l’Assemblée générale des Nations unies, la « journée internationale du dialogue entre les civilisations » gagne en visibilité et s’impose comme un temps fort de la vie politique internationale. Fixée au 10 juin de chaque année sous l’égide de l’UNESCO, elle résulte d’une initiative soutenue et impulsée par la Chine, qui vise à promouvoir la tolérance, le respect mutuel et la solidarité entre les civilisations. À l’heure de la résurgence des tensions géopolitiques et des fractures culturelles, cette journée internationale contribue à maintenir des espaces de dialogues entre les peuples.

Les pays membres de l’UNESCO (organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture) devraient célébrer, le 10 juin 2025, la journée internationale du dialogue entre les civilisations, au siège de l’organisation, place de Fontenoy, dans le 7^e arrondissement de Paris. Plusieurs représentants des États membres de l’UNESCO et de nombreux responsables du monde politique ou économique prévoient de faire le déplacement, et notamment la délégation permanente de la République populaire de Chine auprès de l’UNESCO, représentée par madame Yang Xinyu. Les parties doivent assister à une réception, prononcer des discours et échanger fraternellement dans le cadre de ce nouveau rendez-vous régulier de la diplomatie. Quel est le sens d’une telle initiative ? Quelle en est la portée ? Quel est le message diffusé et comment les États membres de l’UNESCO se sont-ils accordés sur le choix de la date du 10 juin ?

Une résolution adoptée il y a un an

La journée internationale du dialogue entre les civilisations a été adoptée le 7 juin 2024, à l’occasion de la 78^e session de l’Assemblée générale des Nations unies, à New York. Ce jour-là, les États membres de l’ONU adoptent la résolution 78/286, que la majorité d’entre eux ont depuis signée et ratifiée. Lin Jian, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, qui s’est exprimé le 11 juin 2024, a présenté les contours de cette résolution : « Elle affirme clairement que toutes les réalisations des civilisations constituent la richesse commune de l'humanité, elle plaide pour le respect de la diversité des civilisations, et souligne le rôle important du dialogue dans le maintien de la paix mondiale, la promotion du développement commun et l'amélioration du bien-être humain » (Xinhua).

Trois jours après l’adoption de la résolution 78/286, le 10 juin 2024, l’UNESCO avait célébré la première édition de cette nouvelle journée internationale. L'association de la communauté UNESCO (UCA), en partenariat avec le centre d'échanges culturels et artistiques franco-chinois, avait même organisé un événement au siège de l’UNESCO, coïncidant avec la troisième édition de la célébration de la journée internationale du thé, déjà proclamée par les Nations unies en décembre 2019. Le délégué permanent adjoint de la Chine auprès de l’UNESCO, monsieur Wang Ying, avait alors évoqué l'importance de la résolution de l'Assemblée générale des Nations unies, tout en faisant justement le lien avec la culture du thé, partagée le long de l’ancienne route de la soie. La cérémonie organisée au siège de l’UNESCO à Paris en juin de cette année correspond donc au tout premier anniversaire de cette initiative.

Les maîtres mots de cette journée : dialogue et tolérance entre civilisations

Outre le fait de prévoir une journée internationale du dialogue entre les civilisations à la date du 10 juin, qui consiste principalement à « sensibiliser le public à l’importance de la diversité des civilisations et de promouvoir le dialogue, le respect mutuel, la tolérance et la solidarité mondiale », la résolution 78/286 exhorte également les États et les organisations internationales et régionales des Nations unies à mener des activités éducatives et des actions de sensibilisation. Elle les encourage aussi à contribuer financièrement, sur la base du volontariat, à l’organisation de ces activités. Dans ce sens, la résolution 78/286 permet de recréer du lien dans la communauté internationale, à l’heure où certains pays font le choix de l’isolement et du conflit.

© Shen Jizhong / Xinhua

Comme le rappellent les Nations unies sur leur site Internet, le terme de « civilisation » n’est certes pas aisé à définir, mais il correspond selon l’UNESCO à « un phénomène universel, pluraliste et non hiérarchique, reconnaissant que les civilisations sont intrinsèquement façonnées par des dynamiques interculturelles, tout en conservant leur identité propre ». L’organisation de cette journée internationale sert donc surtout à diffuser un message de paix et de non-ingérence dans les affaires intérieures des États. C’est pour cette raison que la résolution rappelle finalement l’importance de l’esprit de la charte des Nations unies et de la déclaration universelle des droits de l'homme : si de nombreux pays ne s’entendent pas sur certains sujets, ils peuvent au moins se retrouver autour des principes fondamentaux des Nations unies.

La Chine et « l’initiative mondiale de civilisation » (IMC)

La journée internationale du dialogue entre les civilisations figure désormais aujourd’hui aux côtés d’autres journées internationales célébrées par l’UNESCO, comme la journée mondiale de la météorologie le 20 mai, la journée mondiale de l'alphabétisation le 8 septembre, ou encore la journée mondiale de la fille le 11 octobre. En mettant chaque année en lumière des enjeux ou des thèmes spécifiques et en consistant en une organisation d'événements, des campagnes et des discussions politiques, ces journées poussent les États à mener des activités en commun et à utiliser un langage universel. Dans ce sens, la journée internationale du dialogue entre les civilisations s’inscrit pleinement dans la théorie chinoise de la « communauté de destin commun pour l’humanité ».

Il convient en effet de rappeler que la résolution 78/286 avait été proposée par la Chine, et qu’elle correspond surtout au résultat de « l'initiative mondiale de civilisation » (IMC), lancée par le président chinois Xi Jinping il y a deux ans. Le 15 mars 2023, le dirigeant chinois avait formulé officiellement cet appel à la communauté internationale lors d’une réunion de haut niveau entre le Parti communiste chinois (PCC) et des partis politiques de différents pays. Xi Jinping avait affirmé que « la tolérance, la coexistence, les échanges et l'apprentissage mutuel entre les différentes civilisations jouaient un rôle irremplaçable pour faire progresser le processus de modernisation de l'humanité ». Il avait mentionné que l’initiative mondiale de civilisation pouvait s’articuler autour de quatre axes majeurs : la promotion du respect de la diversité des civilisations du monde, la promotion des valeurs communes à toute l'humanité, l’héritage des civilisations et enfin la coopération et les échanges internationaux (Global Times). Autant de principes qui sont plus que jamais d’actualité, deux ans après le lancement de cette initiative diplomatique.

Photo du haut : Sun Fanyue / Xinhua