Au premier abord, ils forment une famille parfaite, ou presque. Na Wei (Wang Xiao), un quadra pragmatique, est directeur marketing d’une start-up sur le point de s’introduire en Bourse. Propriétaire d'un grand appartement à Pékin, il conduit une BMW et dispose des actions de son entreprise, qui valent bientôt des millions de yuans. Sa femme, Shen Lin (Yin Tao), une ancienne responsable RH, a choisi de se retrier du monde professionnel pour s’occuper de leurs deux jeunes enfants. Bien qu’elle se questionne parfois sur son rôle de mère au foyer, ses doutes s’évaporent rapidement grâce au soutien indéfectible et à la fidélité de son mari.

Pour résumer, il s'agit d'une famille modèle de la classe moyenne chinoise. Pourtant, des crises la menacent. Son patron, auquel Na Wei est fidèle depuis le début finit par jeter l'éponge, et celui-ci, pris dans l'engrenage des changements, voit son monde s’effondrer : il enchaîne les erreurs jusqu'à son licenciement pour faute grave. Il se lance alors dans l'entrepreneuriat, mais sans succès, tandis que sa femme peine à retrouver un emploi. La crainte du déclassement semble devenir une réalité… 

Adaptée du roman Je ne suis pas un bon à rien de Ji Jingrong, cette tragi-comédie, diffusée en août dernier sur iQiyi et la chaîne de la télévision centrale de Chine, aborde un sujet aussi rare que délicat dans le paysage télévisuel chinois : les angoisses et les fragilités qui hantent la classe moyenne. La perte d'emploi, la maladie d'un proche, voire le travail acharné, peuvent créer un effet domino capable de détruire une famille en un instant. Avec une certaine habileté, la série dresse le portrait de trois couples urbains traversant des zones de turbulences à des étapes de vie bien différentes. Si l'intrigue principale, centrée sur Na Wei et Shen Lin, raconte la chute et le rebond d'une famille confrontée au chômage, les mésaventures des deux autres couples - Na Jun, le petit frère de Na Wei, et Li Xiaoyue ; ainsi que Shen Lei, le petit frère de Shen Lin, et Xie Meilan - permettent, quant à elles, de prendre du recul sur les choix de vie.

Na Jun, un programmeur dans la vingtaine, bien rémunéré et ambitieux, souffre de crises de panique sous la pression du travail. Son mode de vie est en décalage avec celui de sa petite amie, Li Xiaoyue, qui adopte une philosophie plus insouciante, axée sur le plaisir du moment. Quant à l'autre couple, Shen Lei et Xie Meilan, leurs aspirations paradoxales conduisent leur couple à la rupture. Bouleversé par le divorce, Shen Lei décide de tout abandonner pour se retirer dans les montagnes, changeant radicalement de vie. Cela rappelle le phénomène du tangping (« rester allongé »), qui désigne un mode de vie simple et libre, loin des pressions familiales et sociales, et qui gagne du terrain en Chine.

Born to be the One s'inscrit dans la catégorie des séries réalistes qui prennent le pouls de la société, avec l'ambition de résonner profondément auprès d’un public en quête de sens. Dans la lignée des séries telles que All is Well (2019) qui explore les dysfonctionnements familiaux, ou encore A Love for Dilemma (2021) qui chronique la névrose scolaire des parents chinois, Born to be the One tente de mettre en lumière des sujets brûlants de la société chinoise à travers des récits finement ciselés. Il est rare qu’une série dépeigne une telle diversité de modes de vie, sans jugements ni leçons de morale. Le seul bémol : à force de coller de trop près à l'actualité, elle perd parfois en légèreté et en fraîcheur.

Born to be the One 凡人歌

Genre : drame

Diffusion : août 2024

Production : iQiyi

Nombre d'épisodes : 36

Réalisé par Jian Chuanhe

Avec Wang Xiao, Yin Tao, Zhang Ruonan, Qin Junjie...

Photos : iQiyi