
Paris 2024 : la Chine en haut du podium ?
À l'approche des Jeux olympiques, les pronostics vont bon train. Mais une chose est sûre : la Chine, qui se situe dans le haut des classements depuis les années 1990, demeure l'un des compétiteurs les plus sérieux de ces olympiades.
Deuxième du classement final derrière les États-Unis et devant le Japon, la Chine a terminé les Jeux olympiques de Tokyo le 8 août 2021, avec pas moins de 38 médailles d'or, 32 d'argent et 18 de bronze. Un tableau équivalent à celui des derniers jeux de Londres en 2012 où la Chine avait aussi terminé 2e derrière les États-Unis avec 38 médailles d’or. Pour les J.O. de Paris 2024, la Chine entend bien continuer de contrecarrer l’hégémonie olympique américaine cet été, en se maintenant comme son compétiteur le plus sérieux (Les États-Unis sont détenteurs de 18 premières places sur le podium sur un total de 23 olympiades !).
À Tokyo, et sans surprise, la Chine avait gardé une position dominante dans les disciplines où les Chinois brillent traditionnellement. Comme en haltérophilie avec 7 médailles d'or et 1 d'argent, ou en plongeon avec 7 d'or et 5 d'argent. Notons également : 4 médailles d'or, 1 d'argent et 6 de bronze en tir, 2 médailles d'or et 5 d'argent en badminton, et 3 d’or, 3 d’argent, 2 de bronze en gymnastique dont 1 d'or et 2 d'argent en trampoline où l'épreuve féminine aura été remportée pour la première fois par une Chinoise. Parmi les 38 médailles d'or, 12 concernaient des épreuves de groupe. Les Chinois auront en outre battu 4 records du monde en haltérophilie, en tir, en natation, ainsi qu’en cyclisme.
À une exception près et pas des moindres : en tennis de table, sport où le dragon règne en maître incontesté au moins depuis 1988, celui-ci s’était retrouvé en position difficile dans l’épreuve double mixte face à l’hôte japonais, nouveau parvenu, et devant lequel il a dû s’incliner. Dommage : la Chine n’emportera que 4 des 5 médailles d’or de la discipline, un petit drame en Chine, mais un événement qui montre aussi combien les disciplines olympiques restent dynamiques !
Mais c'est là également que certains commentateurs attendent la Chine, c'est-à-dire dans ces disciplines où l'empire du Milieu commence à briller. Si le plongeon, le tir, la natation, l'haltérophilie, le tennis de table, la gymnastique artistique et le badminton sont les principaux sports dans lesquels la Chine remporte des médailles, les épreuves d'athlétisme, de cyclisme, de skateboard ou de BMX freestyle, par exemple, pourraient ne pas être sans surprises.
La Chine brille aux Jeux... grâce aux femmes
© Han Haidan/CNS
Un chiffre est très parlant : sur les 431 athlètes de la délégation chinoise, 298 étaient des femmes, soit plus de 60 % des athlètes. Une proportion en hausse quasiconstante depuis 1984, date du retour de la Chine sur la scène olympique, après un intermède maoïste durant lequel la République populaire avait refusé de participer. Ainsi aux derniers Jeux, Gong Lijiao et Liu Shiying ont offert à la Chine ses premières médailles d'or, respectivement au lancer du poids et au javelot féminins. Wang Zheng aura remporté une médaille d'argent au lancer du marteau féminin. Lu Huihui s'est classée cinquième au javelot. De tout cela, on devine déjà que le lancer féminin pourrait devenir une discipline cruciale pour les athlètes chinois à l'avenir. Ge Manqi a été la seule Asiatique à participer aux demi-finales du 100 mètres féminin et la première Chinoise de l'histoire à y atteindre les demi-finales. Wang Chunyu est devenue la première athlète chinoise à participer à la finale du 800 mètres féminin. Le relais masculin et féminin chinois n’était pas non plus sans surprise, les deux se qualifiant pour la finale du relais 4×100 mètres, là encore une première. Les championnes du monde Xu Shixiao et Sun Mengya ont établi un nouveau record olympique lors de la finale du 500 mètres double aviron féminin, la première médaille d'or olympique pour le canoë féminin chinois. L'athlète chinoise Yin Xiaoyan a remporté une médaille d'argent en karaté moins de 61 kg. En escrime, Sun Yiwen a remporté la médaille d'or à l'épée féminine... Bref, autant de performances qui montrent combien la Chine a brillé grâce à ses femmes athlètes. Performances qui auront consolé les spectateurs chinois scandalisés par l'élimination de leurs équipes féminines de volley-ball et de basket-ball, disciplines où la Chine s'impose traditionnellement...
Une stratégie nationale bien rodée
© Cao Can/Xinhua
Ces résultats ne doivent rien au hasard. La Chine a en effet décidé de « miser » sur les femmes officiellement dès 1995 dans une politique nationale émise par l’Administration générale des sports appelée le « Plan olympique pour la gloire ». Celle-ci consiste à obtenir un maximum de médailles d’or en se concentrant essentiellement sur certaines disciplines délaissées ou moins populaires, résumées en chinois sous l’expression « sports à ‘petites balles’ [ping-pong, badminton, etc..] difficiles, acrobatiques, féminins, et où il y a peu d’athlètes »(小巧难女少).Une stratégie qui a permis au pays de se distinguer ailleurs que là où il lui aurait été difficile de concurrencer l’Occident dans ses sports de prédilection comme le football ou le tennis.
Mais les résultats chinois s’expliquent aussi par une politique d’ouverture qui a permis aux athlètes chinois de partir s’entraîner à l’étranger et de faire venir des entraîneurs étrangers en Chine, ce qui a notamment été le cas en athlétisme, discipline où ne se distinguait pas particulièrement la Chine. Après les Jeux olympiques de Pékin de 2008, l'athlétisme chinois s’est lancé dans un processus intensif d’amélioration, embauchant jusqu'à 17 entraîneurs étrangers de haut niveau, établissant des bases de formation à l'étranger et multipliant les coopérations internationales. Avant l'épidémie, on dénombrait déjà 22 « bases d'entraînement » à l'étranger signées par l'équipe chinoise d'athlétisme avec près de 60 compétiteurs formés à l'étranger toute l'année. Les athlètes chinois se sont donc rapidement rapprochés des athlètes de première classe du monde alors que l'introduction d'enseignants étrangers aura poussé les entraîneurs nationaux à s'aligner sur le niveau international. Le sprinter Su Bingtian en est sûrement la meilleure illustration : devenu la nouvelle égérie nationale, sinon continentale, en terminant seulement 6e au 100 mètres hommes à Tokyo, le Cantonais, entraîné entre autres par l’Américain Randy Huntington, est non seulement le sprinter le plus rapide de Chine (2015) et d’Asie (2018), mais il est surtout le premier Chinois à s’être qualifié au 100 mètres, et le premier Asiatique à accéder à la finale en 89 ans depuis le japonais Takayoshi Yoshioka aux J.O. de Los Angeles en 1932...
Depuis 2000, la Chine monte donc à chaque fois sur le podium olympique : la voie chinoise fonctionne à merveille.
Photo du haut © Fu Tian/CNS
Commentaires