Pékin : flâneries à la Cité interdite

1695021994781 Le 9 Rémi Anicotte
Au cœur de Pékin se trouve la Cité interdite pourpre (Zĭ jìn chéng 紫禁城). Elle s’appelle aussi le Vieux palais de Pékin (Běijng Gùgng 北京故宫). Il s’agit d’une enclave rectangulaire qui abrita les empereurs des dynasties Ming, puis Qing, du XVe au XXe siècle, avant de devenir un musée en 1925.

Nous pouvons contempler la Cité interdite de l’extérieur, à partir du sommet de la Colline des Panoramas (Jĭng shn 景山), également nommée Colline du Charbon (Méi shān 煤山), car elle était le lieu d’entreposage du combustible servant au chauffage d’hiver. De là, l’observateur voit se déployer les toits recouverts de tuiles dorées, et on peroit aussi l’étendue (72 hectares) de l’ensemble.

Cependant, nous, les visiteurs de la Cité Interdite, entrons du côté sud, par la massive Porte du Midi (Wŭ mén 午门). Il faut avoir réservé en ligne, au plus tard la veille. Nous débouchons sur une esplanade dépourvue de végétation, où le pouvoir impérial se mettait en scène lors des grandes cérémonies. De là, nous aurions tendance à nous laisser happer par la puissance de l’axe protocolaire et à avancer tout droit. Mais mieux vaux franchir les portes à droite ou à gauche, afin d’accéder à des zones boisées qui abritent nombre d’arbres aussi anciens que la Cité elle-mme. Ils sont signalés par des étiquettes métalliques rouges portant une inscription et un code QR.

La Porte du Midi de la Cité interdite vue des douves

La disposition d’ensemble est aérée, faisant du ciel l’élément principal du décor, mis en valeur par les toits courbés. Ce complexe palatial est le plus grand du monde. Il est découpé en près de 90 cours qui sont autant d’enceintes dans l’enceinte, avec chacune ses murs et ses portes.

Les quelques 980 bâtiments n’occupent que 20 % de la superficie totale.
Dans ce lieu, nous comprenons vite que la flnerie est la seule approche sensée, et qu’une exploration exhaustive relèverait de l’utopie.

Les amateurs de collections muséales visiteront les expositions temporaires ou permanentes (porcelaines, sculptures, horloges importées d’Europe au XVIIIe siècle, orfèvrerie, jades).

Les explorateurs prendront un café dans les glacières souterraines (bīng jiào 冰窖), ou suivront les allées que le dernier empereur Puyi empruntait à vélo, passant des espaces protocolaires aux lieux de vie et d’agrément.
Les passionnés d’histoire décrypteront 600 ans de strates chronologiques.

Les photographes suivront les perspectives, ou les promeneurs en costumes traditionnels.

Finalement, nous sortons par la Porte des Prouesses divines (Shén wŭ mén 神武门 ), au nord, du côté de la Colline du Charbon, ou par la Porte Orientale de la Gloire (Dōng huá mén 东华门), à l’est, en direction du quartier commerant Wangfujing.

Inscription en chinois et en mandchou sur l’enseigne d’un pavillon de la partie résidentielle

Forcément, nous reviendrons voir les tuiles dorées, les pierres et les bronzes luisant après une pluie, les douves gelées en hiver, la lumière d’un jour de neige, les floraisons au fil des saisons, les chats qui logent dans les zones de services, et les corbeaux que nourrissaient les Mandchous (pour les remercier d’annoncer les malheurs et de nous offrir ainsi l’occasion de s’en protéger).

Rémi Anicotte est sinologue, membre associé du CRLAO (EHESS/CNRS/INALCO). Il est directeur de China Intuition, société implantée à Pékin.

Photos : Rémi Anicotte.

Photo du haut - Les pavés de la Cité interdite : partie rénovée lisse, échantillon témoin de l’état avant la rénovation.

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